Depuis l’avènement de l’Agence UMOA-Titres, les Etats viennent en force sur le marché financier. Mais n’y a-t-il pas un risque de phénomène d’éviction au détriment des entreprises ?
Cette question est centrale pour notre projet de marché des Titres publics. Il nous faut ne pas opposer financement des Etats et financement du secteur privé. Tout d’abord, il nous faut reconnaître que durant la période 2013-2016, on a observé une hausse significative de l’ordre de 78% des émissions des Etats sur le marché régional des Titres Publics. Et ce, pendant que les chiffres du financement des entreprises ne révèlent aucune baisse. Loin de constituer une menace pour le financement des entreprises, ce recours des Etats au marché des titres publics est nécessaire et bénéfique à l’ensemble des acteurs du marché car il a un effet structurant sur le marché du crédit dans sa globalité. Il permet la mise en place d’outils essentiels comme la courbe des taux qui sera la référence pour le financement privé ou l’émergence d’une industrie financière et de l’épargne qui financera également le Secteur privé.
Un marché des titres publics fort est un catalyseur pour les IDE (Investissements Directs Etrangers) ; l’éclosion de nouveaux acteurs comme les fonds de Capital-investissement ou de dette et l’émergence d’un marché de la dette privé.
Si nous avons donc une vision large du financement des entreprises et du secteur privé, l’intervention des Etats sur le marché des titres publics ne peut être perçue comme un frein au financement du secteur privé, mais plutôt comme un acte essentiel de construction d’un marché du crédit plus profond et plus diversifié.
Les Sukuks peuvent-ils constituer une bouffée d’oxygène pour mobiliser plus de ressources, surtout démocratiser et vulgariser la Bourse auprès d’une cible, antérieurement plutôt réticente ?
Il est indéniable que les Sukuks représentent un moyen de mobiliser des ressources supplémentaires. Ils permettent de capter l’épargne d’agents économiques qui n’investissent pas dans les titres classiques. Il nous faut cependant être sûr que les Sukuks sont commercialisés auprès de ces populations sinon nous risquons juste de cannibaliser les autres titres. Il nous faut développer le marché du Sukuk au sens commercial du terme.
La dynamisation du marché secondaire constitue un enjeu fondamental dans la construction d’un marché efficient. Quelles sont les avancées sur le sujet dans notre zone ?
Différentes actions et réformes ont été entreprises durant ces dernières années afin de dynamiser le marché secondaire. Nous pouvons citer, entre autres, l’introduction de titres standards qui sont appelés à s’échanger plus facilement sur le marché secondaire ainsi que l’assimilation et l’abondement de certains titres pour créer sur le même titre des gisements bien plus conséquents et favoriser ainsi les échanges.
Au cours de l’année 2017, nous allons travailler à mettre en place une plateforme de cotations des titres publics émis par adjudication, ce qui devrait aider à donner une meilleure visibilité aux différents acteurs et donc à dynamiser ce marché secondaire.
Sur quel chantier l’Agence UMOA-Titres a focalisé son énergie pour l’année 2017 ? En d’autres termes, quel est son défi majeur à court terme ?
Notre défi majeur réside dans la diversification de la base des investisseurs du marché des titres Publics. Le travail de notoriété et de sensibilisation sur le concept de marché des titres publics, nécessaire à l’atteinte de cet objectif, a commencé avec les compagnies d’assurances et s’étendra à moyen terme aux autres acteurs.
La digitalisation, le futur des titres publics, d’abord en termes d’infrastructures technologiques d’intégration des marchés, ensuite pour vendre plus de produits financiers à une clientèle, de plus en plus interconnectée ?
La diversification de la base d’investisseurs et la démocratisation des produits d’investissement, passeront obligatoirement par la digitalisation des circuits de distribution des émissions des titres publics à l’heure où l’écrasante majorité de la population demeure encore en marge du système bancaire. Et ce d’autant plus que ces titres sont déjà dématérialisés. Les expériences du Kenya ou du Ghana, pays dans lesquels il est possible de souscrire aux émissions de titres publics à partir de son téléphone portable ; mais aussi celle des Etats Unis où il existe une plateforme électronique permettant la même chose, nous interpellent. Nous sommes très attentifs à ces avancées technologiques qui peuvent servir d’exemple.
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