Il faut noter qu’Oragroup est la maisonmère des Orabank, dirigé par un certain Patrick Mestrallet (ex-Cbao), également patron de Financial Bank Togo devenue Orabank Togo, le navire amiral du nouveau groupe. Outre le Togo, Orabank est présente au Bénin, au Gabon, Guinée-Conakry, Mauritanie et au Tchad. Soit dans 6 pays et 4 zones monétaires (Uemoa, Cemac, Guinée et Mauritanie). Une nouvelle dynamique initiée depuis le rachat du groupe en 2009 par Emerging Capital Partners (ECP), le plus important fonds d’investissement en Afrique.
Depuis octobre 2011, Oragroup a accueilli dans son tour de table la BOAD avec une souscription de 2 milliards Fcfa. Ainsi, le capital du groupe passe de 48,58 à 54,96 Mds Fcfa. Il était attendu l’entrée dans son capital de Proparco, filiale de l’Agence française de développement (AFD) et de BIO, une institution de financement publique belge. Il est à noter qu’Oragroup est en compétition avec la camerounaise Afriland First Bank (qui a repris la compagnie d’assurances Ilico, devenue Saar Vie Sénégal) qui, certes pèse plus lourd, mais a le désavantage d’être moins présente dans la sous- région.
Du temps du gouverneur Henry Dacoury Tabley, le groupe BRS a échappé, de peu, à un bradage au profit de NSIA, un groupe bancaire et d’assurances ivoirien et organisé avec la complicité de l’ex-président, Laurent Gbagbo. Il faut dire que la crise politico-militaire de la Côte d’Ivoire a beaucoup influé sur les lenteurs notées dans le processus de cession du groupe BRS.
Et ce groupe BRS revient en effet de loin. Créée le 10 mai 2004 à Lomé avec 87 actionnaires, personnes physiques et morales, il avait été lancé par la Bceao, par un certain Charles Konan Banny, pour soutenir les couches les plus défavorisées de la population dans leurs activités génératrices de revenus. La BRS proposait une nouvelle politique bancaire fondée sur la mutualité ou faire la banque autrement, plus proche des aspirations des populations. Une part importante du capital du Groupe, porté par le FAC-Uemoa, devait faire l’objet de cession aux clients et petits porteurs qui devaient, au final, s’approprier cette «banque du peuple». La cession devait intervenir au bout de 5 ans de management, piloté par la Bceao. Mais cet idéal n’a pu prospérer, face à la dure réalité du métier de la banque… Il faut dire qu’il est encore illusoire sous nos cieux, de prétendre donner des prêts financiers sans garantie, à une population catégorisée pauvre, et vouloir, en même temps, faire du profit, principale raison d’être d’une banque. D’autant que les vœux pieux des Chefs d’Etat de l’Uemoa et de la Bceao, de doter le Groupe BRS de ressources financières à des conditions préférentielles, compte tenu de la vulnérabilité de sa cible, n’ont jamais été exaucés. Il restait aux filiales BRS de revêtir le manteau de banques commerciales et d’aller se frotter au marché interbancaire.
Il se dit que seules 4 des 8 filiales ont pu tirer leur épingle du jeu
Il suffit de prendre un seul exemple pour comprendre comment et pourquoi cet échec était inéluctable. C’est le Programme Taxi, financé par BRS Sénégal à hauteur de 4 Mds Fcfa pour près de 600 taxis. Le Président Wade, ayant créé Seniran Auto avec ses partenaires iraniens, il lui fallait écouler les véhicules fabriqués par son usine. Parmi ses idées novatrices pour développer Seniran, il y avait le programme de renouvellement des taxis du Sénégal. La BRS et le FPE étaient les seules institutions financières à accepter de l’accompagner dans son projet. D’un coût d’environ 7 millions Fcfa, tout promoteur versait un apport de moins de 500 000 Fcfa et disposait d’un véhicule tout neuf. Charge au taximan d’effectuer un versement journalier de 10 000 Fcfa et ainsi devenir propriétaire au bout de 3 ans. Avec un tel partenariat avec l’Etat du Sénégal via Seniran, le ver était dans le fruit. La plupart des promoteurs de taxi refusent encore de rembourser, sous prétexte que «c’est de l’argent public, donné par le Président Wade», à l’époque candidat à sa réélection. No comment !
Aujourd’hui, l’on est tenté de demander quelle sera l’orientation des activités des filiales BRS. Qu’adviendra-t-il de leur mission initiale de lutte contre la pauvreté par le financement des couches défavorisées si Oragroup en devient le gestionnaire ?
Vont-elles se muer en banques commerciales classiques ou en ‘banque des PME’, comme on le subodore ? Mais là aussi, la concurrence est déjà bien présente avec une pléiade de banque nationale de développement des PME, presque dans chaque Etat de l’Union.
Pour le reste, wait and see…
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