EDITO
Le Port : la compétitivité ou l’amerrissage ?
Cœur battant de l’économie, le Port Autonome de Dakar revêt une importance capitale dans les opérations du commerce extérieur du pays. Il suffit seulement de savoir que 90% des échanges commerciaux du Sénégal passe par le Port. Et que 90% des recettes douanières y sont collectées. Soit l’équivalent de la masse salariale de la Fonction publique. Comme quoi, le Port, c’est vital pour le pays !
Dans les années 2000, Bara Sady, portuaire pur jus, avait réussi à révolutionner le visage du Port. A travers des infrastructures modernes comme l’extension du Terminal à conteneurs (en partenariat avec Dubaï Port World), la réhabilitation du Môle 2, la réalisation de la Gare maritime, du Port sec de Bamako, de la Voie de contournement…
En accord avec la Communauté des acteurs portuaires, CAP Dakar, (aux abonnés absents, depuis lors ?), il y eut des avancées notables, notamment le fonctionnement à feu continu des services portuaires, la certification progressive des processus essentiels opérationnels en rapport avec l’accueil des navires et la gestion de la marchandise, la dématérialisation des opérations de dédouanement. Ce qui a conduit au bon résultat, 64ème rang, lors du Doing Business 2011 sur le critère Commerce transfrontalier. Devant de grands pays comme la Russie, la Chine, le Brésil…
Mais depuis lors, sur ce critère, le Sénégal ne cesse de régresser. Ce qui remplit d’amertume Ibrahima Diagne, concepteur de Gainde 2000 et précurseur de cette technologie de pointe au Sénégal et en Afrique. Il ne comprend pas pourquoi les autorités ne veulent pas conduire le processus à son terme…
Juste pour constater que le secteur portuaire est à la croisée des chemins. Déjà que la concertation avec les acteurs est au plus bas avec les crises répétées, liées aux concessions attribuées aux multinationales Bolloré (Terminal Roulier) et Necotrans (Vraquier). Il est vrai qu’elles disposent de l’expertise technologique et de la capacité financière pour réaliser les gros investissements attendus pour une modernisation du Port.
Cependant, cette politique a charrié une polémique avec les acteurs locaux qui pensent qu’on leur a enlevé le pain de la bouche. Une situation de tension qui a obligé l’ARMP à initier une médiation pour concilier les différentes parties…
Pourtant, Cheikh Kanté, un manager flamboyant, entend marquer son empreinte avec son plan «Port horizon 2023», devant propulser le Port de Dakar dans une modernisation continue. Il a du pain sur la planche avec la concurrence. Abidjan a repris du poil de la bête avec un trafic, presque le double de Dakar, et des investissements devant doubler ses capacités dès 2018. Et des infrastructures devant fluidifier la connexion avec les pays de l’hinterland, Burkina, Mali…
Cette bataille de l’hinterland va être l’axe nodal qui va faire la différence. Dakar n’ayant pas de véritables produits à l’export, son développement ne peut passer que par le transit et le transbordement. Aussi, faut-il faire les yeux doux aux Maliens pour qu’ils continuent de transiter par Dakar. Pour ça, il faut réhabiliter la voie ferrée Dakar-Bamako, le meilleur moyen de transport des marchandises.
Pour gagner la bataille de la compétitivité, il faut passer par la case «Concertation». Que l’autorité portuaire accepte d’être plus attentive aux doléances et suggestions, qu’elle partage davantage sa vision et sa stratégie car les victoires, (comme les défaites d’ailleurs…), ne peuvent qu’être collectives…
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