Evoquez la Génération 88 et le nom de Youssou Diallo est rappelé par tous. Un dirigeant charismatique qui a fini par devenir un haut-fonctionnaire de rang exceptionnel. Nous avons retrouvé ce discret fils d’Imam qui a marqué de son empreinte le mouvement estudiantin.
« C’est quelqu’un qui pouvait tenir un discours argumenté, sans notes, pendant 6 heures ». Parlant de son idole et ancien Directeur de Cabinet, puis Conseiller spécial, le Premier ministre Souleymane Ndéné Ndiaye décrit Youssou Diallo comme «le plus grand leader de tous les temps du mouvement étudiant». Quant à Macky Sall, il dira de lui qu’il faisait partie des «meilleurs leaders étudiants».
Alliant charisme, détermination et éloquence, le Conseiller technique n°1 du Ministre de l’Agriculture a marqué la Génération 88. D’ailleurs, il a été choisi, à l’unanimité, pour présider l’AG constitutive de l’association G88. « Définissant la G88, j’ai dit que c’est tous les dirigeants du mouvement étudiant post 68tards. Ou plus précisément, tous les mouvements nés après la grande grève de 77 qui avait vu l’exclusion de 45 étudiants, dont un certain Madické Niang qui a fini ses études en Côte d’Ivoire « , rappelle celui qui a été Conseiller technique en Décentralisation du Président Wade qui traitait l’essentiel du courrier politique.
Acteur majeur du processus de réorganisation du mouvement estudiantin, il était toujours au four et au moulin. « Il m’arrivait de faire 7 réunions par jour, surtout la nuit et on dormait le matin. J’allais rarement aux cours. Je ne peux même pas expliquer comment on faisait pour allier tout cela. Des amis et sympathisants nous passaient les cours. Je pense que nous n’étions pas du tout ordinaires », se remémore-t-il.
Très tôt piqué par le virus du militantisme, Youssou intègre les jeunesses communistes et lit tous les classiques du Marxisme. « Je suis de Saint Louis, ville très politisée à l’époque. Je tenais des discours très engagés en français dès la classe de 3ème. On m’avait inculqué le sens de l’engagement. Lors de la grève de 1977, j’étais à la tête des élèves du Lycée Faidherbe qui soutenaient les étudiants exclus. C’était chaud, un étudiant avait même été tué… », se souvient-il.
Premier de son jury au Bac, il est sélectionné pour les bourses FAC pour faire Biologie ou Maths Sup en France. Mais, il préfère rester au Sénégal. « Quand on venait à l’Université, toutes les libertés étaient suspendues du fait de la grève de 1977, avec la suppression de toutes les unions nationales, de leur présence dans les instances de décision… On s’est battu pour la levée de ce statut et on a recommencé à siéger à l’Assemblée des facultés. Je représentais les étudiants de Droit et Sciences Eco. J’ai été fondateur du Conseil de la Commission sociale… Lors de la grève de 84, le spectre de l’année blanche apparaissait. J’ai soutenu le principe de la session unique en octobre et tout sauf l’année blanche…« , se souvient-il, avec beaucoup de fierté.
L’engagement de Youssou dépasse le milieu estudiantin et a secoué, en haut lieu. Ainsi, Abdou Diouf ou Jean Colin a saisi son père, El Hadj Oumar Diallo, alors Imam Ratib de Saint-Louis, pour tenter de calmer ses ardeurs. Sans suite, bien entendu… « Mon père m’a dit, un jour, de ne jamais trahir mes camarades. Quand il fallait défendre une position, on était prêt à descendre dans la rue… », rappelle-t-il.
Et le reste, une question de destin. Après la grève de 84, ce gauchiste pur et dur se retrouve à l’ENAM, la plus grande école d’administration afin de devenir un grand commis de l’Etat. « Comme on nous savait brillant, ça ne surprenait pas », reconnait-il.
« Le leadership, c’est l’éducation dans des valeurs comme l’intégrité morale, la rigueur intellectuelle, le sens de l’honneur. Et surtout la maitrise acquise par le militantisme. On était bien formés à l’époque, on lisait beaucoup, on savait de quoi on parlait », argue celui qui a occupé presque tous les postes dans la haute administration. Sauf celui de ministre… Encore, une question de destin ?
Discussion à ce sujet post