Cette contribution vise à montrer l’intérêt de combiner une approche régionale du développement des PPP dans la zone UEMOA avec une approche nationale des projets identifiés par les différents pays membres.
L’approche régionale permet de pallier les difficultés actuelles résultant notamment :
- De la faible taille de certaines économies de la région et de la faiblesse des échanges commerciaux dans la zone UEMOA ;
- De la nécessité d’avoir une vision régionale pour le développement et le financement des infrastructures.
1.Une stratégie de développement des PPP basée sur une approche régionale et des pays pilotes…
Seule une approche régionale basée sur le rôle de l’UEMOA peut créer un effet structurant au niveau de la définition de la politique de recours aux PPP et un effet « démultiplicateur » au niveau des moyens et des capacités à mobiliser des financements à structurer et de la définition des « bonnes pratiques »
Pour ce faire, et afin de ne pas rester uniquement au niveau du cadre juridique et institutionnel, il est nécessaire de pouvoir tester la mise en œuvre du cadre régional en identifiant et en mettant en œuvre le processus de décision et d’évaluation des projets à partir de projets de préférence de dimension régionale. C’est le cas du projet de rail Dakar – Bamako.
L’identification de ces projets, leur gestion opérationnelle, et leur financement ne peuvent se faire qu’en passant par l’approche régionale. Il est donc nécessaire de définir un cadre juridique communautaire de mise en œuvre des PPP ainsi qu’une liste de projets potentiels à partir desquels seront menés l’ensemble des études et expériences empiriques nécessaires jusqu’à la sélection du mode de passation en PPP.
Les études et expériences empiriques permettront de réduire l’asymétrie d’information entre le secteur public et privé. En effet, face à des acteurs privés de plus en plus avertis, les représentants du secteur public doivent apparaître comme étant des interlocuteurs crédibles.
2.Une approche régionale basée sur quatre axes…
La mise en place d’un cadre juridique communautaire pourrait se décliner selon quatre axes :
- Définir le rôle de l’UEMOA au niveau de l’élaboration du cadre institutionnel et juridique régional des PPP ;
- Etudier et valider les projets d’envergure régionale ;
- Appuyer les cellules PPP nationales avec la mise en œuvre de guides méthodologiques définissant les « bonnes pratiques » ;
- Développer et promouvoir les financements innovants.
3. L’étude des projets et leur priorisation…
L’identification des projets pilotes à étudier en PPP doit se baser sur une étude de faisabilité qui comprend d’une part l’étude socio-économique, et l’étude économique d’autre part, puis complétée par une première étude de faisabilité financière. Les études de faisabilité doivent intégrer la participation des acteurs privés locaux ou communautaires.
La visibilité apportée par cette démarche doit permettre de susciter un véritable intérêt des entreprises privées, générateur entre autres, d’offres spontanées, mais l’étape de faisabilité du projet doit rester entre les mains de la personne publique afin de maîtriser le processus de décision sur les investissements.
L’existence d’une expertise au niveau régional permettrait de mutualiser les moyens humains et financiers nécessaires, et de structurer les bases de données de référence ainsi que le retour d’expérience qui constituent autant de facteurs de succès pour les PPP. La sélection des projets d’intérêt régional pourrait être basée sur un certain nombre de critères élaborés d’un commun accord avec les pays de la zone, sur la base d’une pré-sélection organisée au niveau national.
4. La définition de guides méthodologiques définissant les bonnes pratiques…
Le cadre légal est nécessaire mais non suffisant pour le développement des PPP. Il doit être complété par des guides méthodologiques pour lequel les cellules PPP nationales pourraient jouer un rôle déterminant.
L’approche régionale doit donc contribuer à une meilleure structuration face à des bailleurs de fonds qui ont parfois tendance à imposer leur propre approche, et à l’importance des offres spontanées qui représentent en Afrique une part élevée des projets lancés en PPP.
Les offres spontanées peuvent être source de blanchissement d’argent et de financement du terrorisme. Il est de la compétence dé l’UEMOA d’assister ses pays membres dans la détection des promoteurs ou sources de financement douteux ou aux conditions de financement « trop » avantageuses par rapport aux conditions de marchés
5. La mise en place de financements innovants…
Le maintien d’une liquidité abondante et d’une concurrence effective au niveau des financements passe par le recours au marché des capitaux. On assiste d’ailleurs à l’émergence dans certains pays de la région (Sénégal, Côte d’Ivoire…) de marchés de capitaux domestiques permettant de mobiliser des fonds locaux par voie obligataire pour le financement à horizon de 6 à 10 ans. La taille des projets et la capacité d’innovation nécessaires à cette évolution font que l’échelle régionale est le niveau le plus pertinent pour tester ces mécanismes de financement par des « obligations d’infrastructure ».
Il serait également intéressant la création d’un véhicule (SPV) dédié au financement des projets régionaux ou similaires pourrait être intéressant. Ce véhicule pourrait être adossé à un fonds de garantie spécial doté par la BOAD et/ou les états membres de l’UEMOA.
6. L’exemple du Sénégal.
Au Sénégal, près d’une vingtaine de projets PPP seront réalisés dans divers secteurs pour un montant estimatif global de 1.587 milliards de FCFA largement financée par le secteur privé (1111 milliards de FCFA) et dont l’Etat du Sénégal prévoit de trouver les financements complémentaires (476 milliards FCFA).
Le Sénégal a déjà mis en place un cadre juridique pour les PPP avec la loi CET. Le Sénégal a compris très tôt l’intérêt de recourir à des PPP pour le financement des infrastructures et des exploitations minières.
La loi CET (Construction Exploitation Transfert) permet la construction, l’exploitation et le transfert d’un ouvrage ou infrastructure par un acteur privé avant son transfert à l’autorité publique après une certaine durée d’exploitation. La loi CET modifiée, au vu des besoins en infrastructures, laisse une place importante aux offres spontanées avec une participation du secteur privé qui doit être au moins égale à 75% de l’investissement total.
Il faut également souligner le choix fait par le président Macky Sall de laisser une place importante aux PPP dans le PSE. Le président Macky Sall a mis en place une architecture ou cadre de financement très intéressant avec : le FONSIS, le FONGIP, la BNDE. A cette architecture, on pourrait y ajouter les fonds gérés par les assureurs du Sénégal qui pourraient venir en complément de financement.
En effet, la structuration ou nature même des PPP fait que ces actifs longs intéresseraient sans doute les assureurs pour couvrir ou adosser leur passif long. En échange, d’un engagement de financement, l’Etat s’engagerait à leur verser une redevance de fonctionnement sur la durée du contrat de PPP.
Cette garantie de revenue périodique sur du long terme correspond parfaitement aux besoins des assureurs de couvrir leurs obligations contractuelles (versement d’indemnités, de pensions, de revenus…)
Bouya NDIAYE///Consultant agréé en montage juridique et financier, et suivi des programmes de PPP
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