La nôtre de rentrée est un peu mimétique, par rapport à certains pays, sur le Vieux Continent en particulier, où les vacances sont sacro-saintes et les villes se vident pendant que les côtes se noircissent de monde. Dans Cher-Pays, la binaire alternative a un sens plus restreint : vacances et rentrée appartenaient surtout aux potaches. Après des mois de bachotage laborieux, parfois douloureusement ponctué d’examens, venait le doux temps du repos, du répit et de la liberté… de ne rien faire. Mais ça, c’était avant. Avant toutes ces années blanches, invalides, menacées, sauvées de justesse, réaménagées, qui tirent en longueur comme du chewing-gum avec, pour conséquence, une perte des repères temporels pour les étudiants, des nerfs à vif pour les professeurs, et… un siège éjectable pour le ministre de tutelle. Aujourd’hui, force est de constater que la ligne de répit semble prendre des vacances prolongées et que l’urgence est omniprésente et à tendance structurelle…
Le nez dans le guidon
La mauvaise nouvelle est que ce fait tend à se généraliser. En effet, l’urgence est partout. Comment peut-on garder des repères cohérents quand les étudiants «bachotent» encore en septembre, que les salariés sortent des affres du Ramadan pour tomber, sans transition, sur la rentrée scolaire de leurs (chers) enfants, que les chefs d’entreprise trop occupés à maintenir la barre par temps de houle n’ont pas même le temps d’enfiler leurs tongs, que le gouvernement vaque sans vacances et que les inondés, toutes banlieues confondues, passent leurs journées à écoper ?
Une saison en enfer
C’est donc une rentrée sans joie qui s’annonce. Le front social est déjà brulant pendant que le soleil continue à darder nos nuques de ses rayons ardents entre deux averses (après lesquelles, il faudra encore et encore écoper…). Pourtant, l’été n’a aucune réalité sémantique sous nos cieux, même si le mot est à la jonction où deux acceptions lexicales du mot «temps» se confondent : le temps comme mesure de la durée des événements et le temps au sens météorologique. Dans les deux cas, l’Homme du 21ème siècle se retrouve dans l’œil du cyclone, si je peux me permettre cette métaphore, un peu hasardeuse. La Terre entière se plaint du dérèglement climatique qui entraîne des coups de chaud en hiver et des frimas en été. Sous nos latitudes, on a épuisé le cycle des sécheresses pour intégrer celui, encore moins enviable, de pluies diluviennes. Ce phénomène, combiné à une boulimie foncière, une urbanisation hérétique et à une incurie des services cadastraux, conduit tout doit à la catastrophe répétée. Et les politiques, qui se succèdent, gardent une constante : à côté de plaque… et en plein dans les flaques ! Vu la récurrence des musiba*, tous gouvernements confondus, on n’a pas l’impression que la réflexion précède l’action…
Snobisme, quand tu nous tiens…
L’été n’a jamais été une saison sahélienne. Pourtant, ce mot fait fureur dès que la saison chaude s’annonce. C’est, encore une fois, par mimétisme ou abus de langage pour les urbains se voulant branchés ou chez les jeunes «swag» (que ceux qui n’ont pas d’ado à la maison viennent me voir pour la traduction) qu’on parle de «mode de l’été», de «tube de l’été» et autres phénomènes de… saison d’hivernage. Il n’est pas moins ridicule, à bien y regarder, de parler en mode demi-saison pour les yéré olof**! Décidément, ces messieurs aussi s’y mettent, même si ce sens ne renvoie à aucune réalité météorologique.
Y’a plus de saison
La réalité est qu’avec ce fameux dérèglement, les saisons n’ont plus grand sens, sauf pour les séries télévisées, de saison 1 à saison 36 avec des personnages récurrents qui ne meurent jamais et qui nous procurent, chaque semaine, notre shoot de crétinisme. Ces purs produits marketing, qui assurent une dépense non énergétique mais somme toute volontaire aux «yama télé»***, toutes latitudes confondues, (les nôtres n’y coupent pas) et assurent de sacrés revenus aux producteurs, publicitaires et autres annonceurs. Enfin, une bonne nouvelle pour l’économie, faut voir le bon côté des choses.
Note : *Catastrophe | **Tenues traditionnelles | ***Accro du tube cathodique
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