C’est à l’occasion du petit déjeuner qu’il a initié avec la presse locale, que le nouveau commandant de bord de la Banque Africaine de Développement (Bad), Serge Marie N’Guessan a passé en en revue les activités de l’institution continentale en générale et celles effectuées au Sénégal en particulier. De leurs nouveaux objectifs contenus dans les «High Five» du Président Adesina Akinwumi, du maintien de la notation du AAA, en passant par les 5225 opérations depuis sa création pour atterrir au 1300 milliards de FCFA injectés au Sénégal depuis 1972 et les projets comme le Ter, le péage, la centrale de Sendou dans lesquels ils ont été les précurseurs, M. N’Guessan s’est illustré dans l’exposé plus ou moins exhaustif des réalisation de la Bad. A «chiffres ouverts».
Bilan de la Bad au Sénégal
Au Sénégal, en 40 ans, c’est-à-dire de 1972 à 2012, nous avons réalisé 101 opérations pour un volume de de financement 1300 mrds de FCFA. En 40 ans d’investissement au Sénégal, la Bad a investi 845 millions d’unités de compte soit environs 670 mrds FCFA. De 2013 à 2017, la Bad a adressé presque le montant avec 756 millions d’unités de compte soit 599 mrds de FCFA. En cinq ans, les opérations de la Bad ont triplé. Entre 2015 et 2017, nous avons investi sur le guichet Bad, 455 millions d’unités de compte, soit 366 mrds de FCFA. Ces cinq dernières années, le Sénégal a bénéficié d’investissements record de la Bad qui ont été faits sur des projets stratégiques clés du PSE. Nous avons été le leader sur AIBD où nous avons attiré les autres investisseurs. Et la Bad est intervenue à hauteur de 70 millions d’euros. L’autoroute à péage c’est la Bad avec 12 millions d’euros on a mobilisé du secteur privé la part qu’il fallait. Nous sommes intervenus sur la centrale à charbon de Sendou, sur le Port de Dakar, dans Promoville, entre autres. Nous sommes sur le TER à hauteur de 150 millions d’unités de compte soit 120 mrds de FCFA. Nous sommes fiers des résultats que nous voyons au Sénégal. Je ne dis pas que tout est parfait parce que je tiens compte des critiques constructives, surtout celles venant des médias. Mais quand je vois ces chiffres, pour quelqu’un qui vient d’arriver, je dis félicitations au gouvernement, aux sénégalais.
La dette du Sénégal en question
Le débat sur la dette doit être analysé de manière globale. S’endetter n’est pas mauvais, mais il faut bien s’endetter et bien utiliser les prêts qu’on fait, c’est-à-dire réaliser des programmes structurants qui peuvent faire rembourser cette dette. On doit arrêter de nous mettre ce torchon rouge de la dette sur nos pays africains. Même les Etats s’endettent et ils en ont le taux le plus élevé. La situation du Sénégal est dans les normes si on considère la rentabilité de cette dette et la capacité du Sénégal à générer des ressources propres. Nous ne sommes pas dogmatiques et nous ne sommes pas encore inquiets de la dette du Sénégal. D’ailleurs nous allons continuer à l’accompagner à mieux gérer sa dette surtout dans les secteurs à fort potentiel
Lenteur de l’absorption des ressources mises à la disposition du Sénégal
Il faut que les ressources mises à la disposition du Sénégal soient rapidement utilisées. En 2016, on a décaissé, 6,3 milliards de dollars mais le taux de décaissement du Sénégal est lent. Ce n’est que de 19% pour ce qui concerne les projets nationaux. Quand j’arrivais en septembre, il était de 16%. Mais cela peut se comprendre parce que les projets du Sénégal sont neufs. Sur les projets du secteur privé, on a décaissé 96%. En 2018, on prévoit d’approuver les projets à hauteur de 33 milliards FCFA à injecter dans trois grands secteurs que sont l’emploi des jeunes à travers l’agro business, puis d’ans l’agro-industrie et enfin le secteur minier avec une formation des jeunes à pouvoirs travailler dans le pétrole. Il y’aura également l’approbation de la phase 2 du corridor Sénoba Ziguinchor.
Les cinq grandes priorités de la Bad
La Bad fait 80 pays dont 54 en Afrique et 26 autres qui ne sont pas du continent d’où les rotations des assemblées générales dans le continent et en dehors.
Depuis l’arrivée du Président Akinwumi Adesina en septembre 2015, le focus a été mis sur cinq grandes priorités dénommées les «High Five» en continuité des points de la stratégie décennale 2013-2022 axée sur le développement des infrastructures, l’industrialisation, l’intégration régionale, le développement des compétences et l’amélioration de la gouvernance avec l’objectif phare qui était de faire la promotion de la croissance inclusive et verte.
La réalisation des cinq priorités de la stratégie à mettre en branle à l’horizon 2025 sera la réalisation d’une Afrique qui compte sur le plan international. Il s’agira d’éclairer le continent, pour les industries et pour les populations. L’Afrique doit cesser d’être noire, et pour cela la Bad compte effectuer la mise en réseau électrique de 130 millions de nouvelles connexions, et 75 millions hors réseau. La seconde priorité sera de nourrir le continent à travers la transformation de l’agriculture pour en faire une agriculture commerciale, une agriculture d’affaires. Avec cette ambition, la Bad souhaite éliminer l’extrême pauvreté sur le continent pour 130 millions de personnes. Ensuite, il y a l’industrialisation avec les potentialités de nos pays par l’artisanat, l’agro business et autres, en passant du petit tâcheronnage aux petites unités, sur un objectif de 130%. La Bad compte aussi œuvrer pour le renforcement de l’intégration régionale avec des échanges commerciaux entre nos états équivalent à 52% d’échanges globaux, l’intégration des systèmes financiers pour faciliter les flux. Pour ce faire, il nous faudra fédérer nos efforts. Enfin, la cinquième priorité consistera à améliorer la qualité de vie des populations avec l’emploi comme focus principal avec l’objectif d’en créer 25 millions à l’horizon 2025.
Le social
Nous sommes préoccupés par le phénomène de l’émigration de notre jeunesse. Même si les jeunes devaient emprunter les voies légales pour partir, nous estimons que ce n’est la bonne chose car voir sa jeunesse partir ailleurs c’est inquiétant. La jeunesse c’est l’avenir. Elle doit être bien formée afin de prendre en main le devenir de ce continent. Nous avons tablé sur un objectif de 25 millions d’emplois à l’horizon 2025 et nous savons que c’est aujourd’hui qu’il faut engager le travail pour atteindre cet objectif. Nous sommes conscients que la problématique de l’emploi est complexe. En 2016 on a pu créer 630 mille emplois, mais ce n’est pas suffisant si on met en relation avec notre objectif. Il nous faut réaliser 2 millions d’emplois par an pour y arriver.
La question de l’emploi est une question de dialogue que la Bad va entretenir avec le pays. Il ne faut pas perdre de vue le fait que l’emploi est un objectif macro-économique qui est souvent pris pour un secteur. C’est un objectif que le pays doit se fixer au même titre que la stabilisation de sa dette, ou de son taux d’inflation. Pour ce faire, il faut que dans les politiques économiques, un certain nombre de réformes soient fixées. On a constaté que ces dix dernières années de croissance économiques n’étaient porteuses d’emplois.
La Bad en chiffres
L’objectif phare de l’institution, c’est de réaliser le développement socio-économique et surtout d’accélérer la réduction de la pauvreté sur le continent.
Pour y arriver, le travail qui a été réalisé depuis la création de l’institution est de 5225 opérations même s’il faut se rappeler qu’à sa création en 1963, la première activité n’a été opérée qu’en 1967. Alors que certains prédisaient sa mort au lendemain de sa naissance, la Bad se positionne en première institution de financement du développement du continent et c’est une fierté pour tous les peuples.
Pendant toute l’année 2015, nous élaborions la stratégie décennale. En 2016, c’est le début des investissements avec des chiffres impressionnants, jamais atteints. Pour la première fois, nous avons investi 10, 8 milliards de dollars sur le continent, soit une croissance de 27% par rapport à 2015. Nous avons décaissés de l’argent frais et injecté dans les économies des états un montant de 6,3 milliards de dollars réparties aux cinq priorités. Et la priorité sur l’amélioration de la vie a pris 52%, l’agriculture 12%, l’énergie 19%. 2016 a été, sur le plan économique, une année de choc économique, difficile pour nos états qui ont été soutenu par la Bad. Malgré tout, la banque a pu conserver son AAA.