15 octobre 1987- 15 octobre 2017, voilà trente ans que Thomas Sankara disparaissait abattu par les hommes de son frère d’armes: Blaise Compaoré .Trente ans après son souvenir reste vivace. Il reste le héros et le leader dont rêve toute une jeunesse africaine. Malheureusement, ses idées sont certes populaires, mais sont loin de diriger le continent…Pour le moment !
En 1987 lors de la 25ème conférence des chefs d’Etat de la défunte Organisation de l’Unité Africaine (devenue Union Africaine) à Addis-Abeba, le Président Sankara appelle ses pairs à se soulever contre la dette et la dépendance. En 2017, cette même dette continue d’asphyxier les économies du continent et le débat sur le Franc CFA montre oh combien elles sont encore inféodés…
En 1986 au sommet de l’arbre, le Président Sankara appelle ses concitoyens à planter des arbres pour faire face à la sécheresse. Le pays en plantera 10 millions dans le cadre du Programme Populaire de Développement (PPD). Une grande victoire pour Sankara, félicité par tous les organismes internationaux. Aujourd’hui, ces mêmes organismes exhortent les dirigeants du continent à aller vers l’économie verte.
En 1984, dés son arrivée au pouvoir, il mène une lutte sans merci contre la corruption, le népotisme et érige la bonne gouvernance en règle de conduite. Le train de vie de l’Etat est drastiquement réduit. Il vend les voitures de luxe, lui et ses ministres ne voyagent plus en Première Classe, les dépenses sont réduites au strict minimum. Le Burkina Faso, à ce niveau, fait des pas de géant et devient un modèle de bonne gouvernance. Trente ans plus tard, les administrateurs du FMI et de la Banque Mondiale, tels des Ministres des finances, continuent de rappeler aux gouvernants africains infantilisés, les règles de bases d’une bonne gouvernance.
Entre 1983 et 1987, le taux de scolarisation passe de 16 à 24 %. Le taux d’analphabétisme recule chez les hommes de 95 à 80 %. Chaque école-son village est son mot d’ordre. Des centaines d’écoles vont être construites en quatre ans. Aujourd’hui au Sénégal par exemple , on en est encore à » Ubi Tay Jang Tay ».
En 1984, Sankara déclare: Un village- Un poste de santé. 2 Millions et demi de Burkinabé sont vaccinés en trois ans. Sa politique éradique la polio, la rougeole et la méningite. L’OMS loue la politique du Burkina-Faso. Aujourd’hui, l’Afrique peine toujours à se soigner. Ebola, le sida et le paludisme tuent encore et encore.
En 1987, le Président Sankara, déclara à propos des femmes ceci : « Animé par la sève vigoureuse de la liberté, les hommes du Burkina, les humiliés et les hors la loi d’hier ont reçu en partage ce qu’il y a de plus précieux au monde : l’honneur et la dignité. A partir de ce moment-là, le bonheur devient accessible. Chaque jour, nous progressons vers cela, ivres des premiers fruits de nos luttes, eux-mêmes étant la preuve des grands pas que nous avons déjà fait. Mais le bonheur égotiste est une illusion. Il y manque un élément crucial : les femmes. La révolution et la libération des femmes vont de paire. Nous ne parlons pas de l’émancipation des femmes comme d’un acte charitable ou résultant d’un élan de compassion… ». C’est dans ce sens qu’il instaura la journée de solidarité, c’est-à-dire, un jour au cours duquel, les hommes remplaçaient les femmes dans les tâches qui leurs étaient dévolues. Trente ans plus tard, on convie l’Afrique à faire place à la théorie du genre…
Ecoûtons encore le Président Sankara parler, bien avant tout le monde, de la lutte pour l’émancipation de la gent- féminine :
«Nous devons comprendre comment la lutte des femmes burkinabé d’aujourd’hui fait partie de la lutte de toutes les femmes dans le monde et au-delà de cela, la réhabilitation pleine et entière de notre continent. La question des femmes est donc au cœur même de l’humanité elle-même, ici, là-bas et partout ».
A travers ces quelques exemples de l’action du Président Sankara, (il y en a bien d’autres) on peut aisément comprendre, au regard de ce qu’il se passe actuellement sur le continent, quel est le prototype du leader que la population africaine attend.
Sankara a certes, fait tantôt des erreurs, s’est précipité parfois, mais il a toujours été honnête et sincère. Ce n’était point un génie, juste avec des mesures simples et accessibles, il a montré que la pauvreté de l’Afrique n’était pas une fatalité. Mais n’est-ce-pas Charles Péguy qui dit « C’est le propre du génie de procéder par les idées les plus simples »?