La situation est préoccupante et grave pour l’enseignement dans notre pays, l’école publique se trouve en faillite par la récurrence des grèves et une année blanche pointe son nez si rien n’est fait. Ceci est le résultat d’une politique mûrement et froidement mise en place depuis les années d’ajustement structurel du Président Abdou Diouf. Et ceci pour faire progresser l’école privée et dévaloriser notre enseignement public.
Nous en avons une conviction tant la dégénérescence de notre système scolaire a été accéléré. Il s’est installé depuis un laxisme coupable de la part de l’Etat. Ce laxisme s’est mué en posture.
Le privé a tiré entre temps son épingle du jeu et les ménages sénégalais sont dans la situation révoltante de devoir consacrer au moins un tiers de leur revenu à l’éducation de leurs enfants, pour permettre à ceux-ci d’avoir une scolarité de qualité. Cet état de fait est tout simplement révoltant et la liste des complices de cette conspiration est longue, très longue.
Rien que dans notre jeune génération, il y a à peine vingt ans, il était honteux de dire en société qu’on fait l’école privée. Vu l’excellence du système public et la qualité de ses enseignements, le privé était voué aux nullards (exception faite des privées catholiques et d’autres écoles privées de la petite bourgeoisie citadine où il y avait quand même une qualité incontestable). Aujourd’hui la qualité a changé de camp, elle est payante pour les ménages sénégalais et coûte cher. Il n’y a aucune compassion pour les couches faibles sur ce sujet dans notre pays. L’indifférence constatée frise l’irresponsabilité collective. Chaque famille tire la couverture de son coté du moment qu’elle trouve, parfois difficilement, une solution à l’échelle individuelle en finançant la scolarité familiale dans le privé. Les couches les plus démunies de notre pays se récupéreront la médiocrité organisée du système scolaire public, tandis que ceux qui en ont les moyens bénéficieront de l’excellence favorisée du privé. Tout le contraire d’une République qui aspire à l’émergence, d’une République qui devrait faire de l’école l’ascenseur social le plus fonctionnel. Par ailleurs cet ascenseur a bien opéré jusque-là, il a vu des sénégalais les plus modestes devenir grands intellectuels reconnus dans le monde, ministre, grand fonctionnaire de l’Etat et Président de la république. Après en avoir profité, chercherait on a fermé la porte derrière nous ?
Il serait tant de rectifier le tir. Il ne suffit pas de dire qu’on investit dans l’école, qu’on y verse des sommes colossales. Vu le résultat auquel on aboutit ça pose une question d’efficacité et de management de la dépense publique. Le vrai problème d’ailleurs n’est pas qu’un problème de moyen mais aussi de volonté politique et de vision. Il faut organiser l’école publique, la financer, l’accompagner, la challenger, surveiller et contrôler la destination des fonds qui lui sont alloués et enfin la pacifier, avec l’aide des enseignants et des parents d’élève qui sont des pièces maîtresses du système. L’Ecole publique sénégalaise a connu l’excellence, qui l’a déjà quitté par un sabotage organisé. Il est de la responsabilité des citoyens, de la société civile, des parents d’élève d’exiger sa réhabilitation. Il est temps que sur ce sujet, qu’un Etat stratège reprenne le dessus. Car on le sait tous, aucun développement n’est possible sans une éducation de qualité pour tous et surtout pour les couches sociales frappées par la pauvreté et un difficile accès au savoir et à l’éducation. Nous invitons le chef de l’Etat à persévérer dans la recherche de solution pérenne sur ce secteur. La pertinence de son implication au-delà de l’action de son gouvernement est due à sa légitimité et à son pouvoir de pouvoir rapprocher les positions entre celui-ci et les syndicats au vu de sa légitimité politique et institutionnelle. Monsieur le Président vous êtes l’arbitre et le modérateur du débat social, donc notre dernier recours. Quand les choix d’ordre stratégique seront réglés en tranchés au niveau étatique. Il ne sera pas difficile pour un Etat volontariste pour une éducation de qualité au cœur de ses politiques, de nouer un dialogue sain et constructif avec les autres acteurs pour voir revenir l’excellence dans l’éducation publique sénégalaise, au drame du privé. Parce qu’au vu de la recrudescence et de la permanence de la crise scolaire au fil des ans depuis plus de vingt ans, il est évident que sa solution appelle une approche structurelle et pas des pansements épidermiques et circonstanciels.
Mais pour réhabiliter notre système d’enseignement public il faudra vraiment le vouloir car les intérêts particuliers ont tendance a triomphé sur l’intérêt général dans un pays comme le nôtre où le patriotisme et l’éthique reculent tous les jours emportant avec eux le sens de l’intérêt commun et d’une communauté de destin à construire sur un modèle républicain basé sur l’égalité de chances.
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