Quelles sont les localités ciblées dans la phase test du programme ? Comment se fera la répartition pour une équité territoriale et une inclusion sociale ?
Le projet porte sur la construction de 100 000 logements, dont 60% seront réalisés dans le triangle Dakar-Thiès-Mbour et 40% dans toutes les autres villes du Sénégal de plus de dix mille (10 000) habitants.
La répartition est faite ainsi :
- 50% des logements seront destinés aux demandeurs primo-accédant dont le revenu mensuel ne dépasse pas 450 000 FCFA et ils seront choisis sur la plateforme d’inscription mise en place par l’Etat ;
- 20% seront réservés à nos compatriotes de la Diaspora qui doit être accompagnée et surtout rassurée ;
- 30% seront d’un standing plus élevé pour assurer une mixité sociale, mais surtout permettre au promoteur de faire une péréquation financière.
A quelle date peut-on espérer la livraison des premiers logements réalisés dans le cadre du programme ?
Les premiers logements seront livrés à la fin décembre 2020.
Il a été constaté un afflux de demandeurs sur la plateforme d’inscription informatique créée à cet effet. Quels enseignements tirés du succès du programme ? Avez-vous déjà une idée claire sur le nombre de demandeurs et le profil des éventuels bénéficiaires ?
Le Ministère de l’Urbanisme, du Logement et de l’Hygiène publique a mis en place une plateforme numérique permettant l’inscription en ligne des Sénégalais intéressés aux logements du projet. Entre autres critères, les demandeurs ciblés doivent être des primo-accédant avec des revenus mensuels ne dépassant pas 450 000 FCFA. Le projet vise ainsi une cible potentielle bien cadrée, mais relativement importante, puisque l’écrasante majorité des travailleurs ont des revenus sous cette barre. En effet, pour un logement vendu à moins de 12 millions de FCFA, la plateforme enregistre actuellement plus de 385 000 demandes et la région de Dakar polarise, à elle seule, plus de 190 000 demandeurs.
L’Assemblée nationale a adopté le projet de loi portant création de la Société d’aménagement foncier et de rénovation urbaine (SAFRU SA). Quelles sont les missions assignées à cette structure ?
La SAFRU aura en charge la bonne mise en œuvre de l’aménagement de Daga Kholpa. A ce titre, elle aura notamment pour missions :
- L’appui à la mise en place d’une équipe projet, en charge de l’aménagement du pôle de Daga Kholpa et son management ;
- Le pilotage et le suivi de l’opération d’aménagement, et notamment :
- Participation au développement d’outils de pilotage (planification, coûts, risques, etc.) avec l’aide de Consultants internationaux ;
- Utilisation des outils et établissements de tableaux de bords / rapports d’avancements ;
- Conduite des réunions d’avancement.
- Du pilotage de l’ensemble des activités nécessaires à la mise en place de l’opération, et notamment :
à court terme :
- Réalisation d’études préalables : étude de marché, étude de faisabilité économique et financière de l’opération, étude sur la mobilité, étude technique, etc. ;
- Optimisation de la programmation de l’opération : logements, activités économiques, équipements publics ;
- Développement d’un phasage et d’une planification réaliste de l’opération ;
- Coordination et suivi des travaux de VRD primaires.
à plus long terme :
- Planification et supervision des travaux de construction des équipements publics ;
- Conduite du processus de commercialisation des lots destinés à l’habitat auprès des promoteurs privés ;
- Conduite du processus de commercialisation des espaces réservés aux activités des acteurs économiques.
- De la concertation et de la coordination de l’ensemble des acteurs concernés par l’opération, et en particulier :
- Les acteurs au sein du Ministère (et en particulier au sein de la Direction Générale de l’Urbanisme et de l’Architecture – DGUA, et de la Direction Générale de la Construction et de l’Habitat – DGCH) ;
- Les acteurs étatiques en interface (et notamment la Direction Générale à la Promotion des Pôles Urbains de Diamniadio et du Lac Rose – DGPU, de l’Agence de la Promotion des Investissements et grands travaux – APIX) ;
- Les concessionnaires de réseau (SONES, ONAS, SENELEC, SONATEL, etc.) ;
- Les institutions financières (Fonds pour l’Habitat Social, BHS, Banques commerciales et autres établissements financiers, etc.) ;
- Les promoteurs publics et privés, entreprises de construction, coopératives d’habitats, etc. ;
- Les acteurs économiques susceptibles de s’implanter sur la zone ;
- Les communautés villageoises présentes sur le foncier du projet ;
- De la participation aux réflexions et ateliers en lien avec le pôle urbain de Daga Kholpa, mais également en lien avec l’ensemble des projets d’aménagement.
Le Programme Zéro Bidonville (PROZEBID) demeure toujours un des chantiers de votre ministère. Ce projet est-il toujours d’actualité ? Quels sont les écueils qui se posent à sa concrétisation ?
Le PROZEBID est un programme intersectoriel et pluri-institutionnel qui cible plus de 2 500 000 personnes, soit près de 300 000 ménages habitant dans les bidonvilles. Pour faciliter l’atteinte de ses objectifs, le programme a été articulé autour de quatre domaines d’intervention.
Le PROZEBID sera exécuté sur l’ensemble du pays en trois phases, jusqu’à l’horizon 2035, correspondant à la période de couverture du PSE :
- Une phase prioritaire dite pilote de 5 ans (2020-2024) couvrant 10 villes à croissance rapide ;
- Une phase d’accélération dite de passage à l’échelle de 6 ans (2025-2030) ciblant 25 autres villes ;
- Une phase de généralisation dite d’éradication des bidonvilles de 2031 à
Le Sénégal a une longue expérience de lutte contre les bidonvilles. Cependant, en plus de l’approche traditionnelle de restructuration urbaine et de régularisation foncière bien connue au Sénégal, le PROZEBID compte mettre en œuvre d’autres modèles innovants comme celui expérimenté au quartier Baraka de Liberté 6, à Dakar.
Le PROZEBID est aujourd’hui le programme phare du MULHP, car le projet des 100 000 logements et le projet Zéro déchet y sont logés.
L’aménagement du foncier constitue un énorme défi, eu égard au coût des investissements nécessaires à cet effet. Selon vous, quels mécanismes financiers mettre en place pour suppléer l’État ?
La viabilisation constitue un des éléments de coût assez lourd à supporter par les promoteurs qui éprouvent de la peine à la fois à mobiliser le financement nécessaire pour les réseaux et à répercuter ce coût sur les acquéreurs. Afin d’éviter le renchérissement des logements mis en vente sur le marché, les promoteurs ont souvent évité de réaliser les réseaux primaires en se contentant d’exécuter seulement les réseaux secondaires in situ avec le minimum de standing.
Pour la réussite du projet en termes de coûts, de qualité et de maîtrise des délais, les réseaux primaires des sites seront pris en charge par les pouvoirs publics, soit sous la maîtrise d’ouvrage délégué de la Société d’Aménagement Foncière et de Rénovation Urbaine (SAFRU), soit à travers la contractualisation avec des entreprises spécialisées en travaux de viabilisation. Ce coût à délester des promoteurs est estimé à 150 milliards, équivalant à une réduction de 1,5 million de FCFA en moyenne sur chaque logement. Ceci correspondra à la subvention directe de l’Etat à l’endroit des acquéreurs les plus démunis pour accroire leur solvabilité.
Concernant la viabilisation in situ portant sur les voiries, réseaux et aménagements divers, elle sera réalisée à la charge des porteurs de projets (promoteurs, coopératives ou auto-constructeurs) avant d’être répercutée sur les prix de vente des logements. Il est estimé que cette viabilisation in situ coutera en moyenne 3,5 millions par unité d’habitation. Considérant que le projet prévoit de consacrer 50% des superficies aux logements sociaux et le reste aux logements économiques et de standing, il est envisagé de répercuter un coût de viabilisation plus bas sur les logements sociaux par application du principe de la péréquation.
À travers différentes initiatives, l’État entend accompagner les développeurs publics et privés à résorber le criard déficit actuel en logements sociaux. Quelles sont vos attentes dans ce domaine ?
De nombreux outils créés et sont déjà opérationnels : la SAFRU et le FHS.
La SAFRU va rendre le site de Daga Kholpa opérationnel d’ici la fin de l’année et le FHS va venir en aide aux promoteurs sur la réalisation des VRD primaires et hors site. Dans la chaîne de valeurs de la construction, le foncier et son aménagement sont les plus coûteux (40% du prix) et dans ce projet, ils seront pris en charge par l’Etat. Ce qui entraîne une augmentation du volume de logements à produire.
Le financement est l’une des clés de l’accès aux logements. Selon vous, quelles mesures et décisions prendre pour briser le cycle de difficultés que rencontrent les Sénégalais pour obtenir des prêts immobiliers ?
Rendre les logements accessibles nécessite un accompagnement financier adéquat du côté aussi bien de l’offre/promoteur que de la demande/acquéreur.
Comme une rengaine, bon nombre de Sénégalais ne cessent de se plaindre de la cherté des logements sociaux des promoteurs privés. Peut-on espérer une diminution des prix qui seront proposés dans le cadre du programme des « 100 000 logements » ?
Le projet 100 000 logements constitue l’un des plus grands projets des cinq prochaines années du gouvernement en termes de volume d’investissement et d’impact sur la croissance et la création d’emplois. Les résultats attendus sont : l’accès de 100 000 ménages à un habitat décent et l’élimination, en autant d’unités, du nombre de futures habitations abordables aux couches dont les revenus sont faibles et irréguliers.
La diminution des prix sera une réalité d’autant plus d’outils et de leviers sont mis en place pour arriver à une baisse drastique des coûts de sortie des logements.
De plus en plus, la promotion d’une industrie locale de la construction est devenue une exigence, surtout avec le récent boom des chantiers des logements sociaux. Votre avis sur ce sujet et son apport dans l’accessibilité des logements sociaux ?
Multiplier l’offre actuelle des promoteurs par 5, voire 10, exige une approche totalement nouvelle qui nécessite, à la fois, de l’innovation, de la rationalisation, de la systématisation et de la standardisation de la production de logements. Ces actions participent à la restructuration et au renforcement de l’écosystème de la construction qui a été identifié comme un des piliers de réussite du projet des 100 000 logements.
Le développement de l’écosystème de la construction ne se limite pas simplement à la promotion des matériaux locaux. Il englobe tous les jalons de la chaîne conduisant à la production de logements : recherche-conception- technologie-matériaux-système et méthode de mise en œuvre. L’objectif recherché étant la construction de logements durables et à coûts considérablement réduits de manière à les rendre abordables pour le plus grand nombre de demandeurs.
Le développement de l’habitat a longtemps souffert de la contreperformance du système, aussi bien en quantité qu’en qualité, du fait de la faible capacité du personnel d’œuvre, de l’inefficacité des systèmes de bâtir, de l’utilisation de matériaux inappropriés et peu économes, du manque de standardisation et de l’absence d’innovation. Pour pallier ces manquements, il est prévu, comme mesures d’accompagnement du projet 100 000 logements, de relancer/recréer le centre de recherches pour la construction et l’habitat, de promouvoir l’innovation en exploitant les brevets produits par les Sénégalais, d’œuvrer en faveur de l’émergence de champions nationaux de production de matériaux et composants entrant dans la construction.
Le sous-secteur de l’habitat est reconnu comme étant un puissant accélérateur de la croissance économique, tout comme la fabrication locale des matériaux de construction et d’équipement des logements contribue à l’optimisation des coûts et à la réduction des délais. Ainsi, comme pour les matériaux du gros-œuvre, produits majoritairement dans le pays, d’énormes opportunités existent pour la production en grandes quantités des menuiseries, des matériels sanitaires, des carreaux et des matériaux de peinture.
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