«Le Mali est debout et en ordre de marche», déclarait IBK à l’occasion du 53e anniversaire de l’accession à l’Indépendance du Mali. Cette souveraineté avait subi un grand choc à cause de la rébellion touareg, suivi du coup d’Etat militaire et la présence de groupes terroristes qui voulaient imposer la Charia islamique dans tout le pays. Et pourtant, le Mali était cité en exemple pour sa démocratie, son hospitalité légendaire, la multiplicité culturelle, la cohabitation en symbiose entre bamanan, songhaï, peulh, dogon, minianka, bobo, etc. Le Mali, qui reprend sa place de 1er producteur de coton graine avec +500 000 tonnes et qui se bat avec la Tanzanie pour la 3ème place de producteur d’or en Afrique. Ce qui faisait de ce pays, un vrai havre de paix.
Malheureusement, en janvier 2012, l’occupation par les groupes armées et le coup d’Etat militaire, soit le 3ème de l’histoire du pays, prirent le dessus sur la démocratie dite exemplaire. Après ce chaos politique et alors que personne n’y croyait plus, le Mali a signé son retour dans le concert des nations. Le 19 septembre, Bamako est redevenue le centre de convergence de l’Afrique avec la cérémonie populaire d’investiture d’IBK. L’attention portée sur le pays fut très positive, contrairement à une attaque de Diabaly ou de Konna ou même un accrochage entre les forces armées et rebelles du MNLA.
La relance doit être forte. Le pari doit être gagné, prône Bamako. «Le Mali doit être un pays qui ne baissera plus la tête», la traduction en acte du slogan de campagne du président élu. Il rappelait, à l’occasion de son adresse à la Nation, le 22 septembre que son pays devrait être un pays de diversités et de convivialité préservées.
Les priorités des priorités
Après vingt ans de démocratie presque ratée, la reconstruction du Mali s’avère plus que jamais un challenge. Un défi que IBK et son équipe devrait relever. Parmi les priorités, IBK devrait mettre en avant la réconciliation nationale. Il doit rapprocher tout le peuple malien, du Sud au Nord. Ensuite, réconcilier le peuple et la politique en démontrant que les hommes politiques, y compris lui-même, doivent se battre pour développer le pays. Il doit redonner confiance à un peuple déçu par la politique en mettant en avant, la lutte contre la corruption et à tous les niveaux. D’ailleurs, il rappelait que «le service public doit être efficient. Les fonctionnaires absentéistes ou chroniquement retardataires devront impérativement modifier leur comportement… Les effectifs pléthoriques et désœuvrés en train de siroter le thé dans un bureau transformé en marché, c’est fini ! Chaque responsable, au niveau où il se trouvera, sera comptable de l’efficience de ses subordonnés». Un discours à la Capitaine Sankara du Burkina qui, non seulement réconforte une grande majorité des Maliens, mais effraie l’autre partie, minimalisée à cause de son passé.
Malgré les difficultés, l’homme de la situation promet qu’il sera mis un coup d’arrêt à la magouille foncière et la spoliation des pauvres ou des vrais titulaires. Tout sera fait pour doter le pays d’un système cadastral fiable et ce, dans des délais raisonnables.
S’agissant de la justice, la promesse est tout aussi ambitieuse avec «la fin des procès, monnayés dans les bureaux de juges oublieux de l’éthique… Nous stopperons le délitement de l’appareil judiciaire, seul contre-pouvoir sûr dans les démocraties représentatives», promet le chef de l’Etat.
Un grappin sera mis à la machine de la corruption. Selon le nouvel homme fort du Mali, l’argent de l’Etat restera dans les caisses et sera investi à bon escient, au service de l’intérêt général.
Si IBK prône le bannissement de l’usage des véhicules de l’Etat pour des usages personnels, il doit, par conséquent, penser à augmenter le salaire de ces mêmes fonctionnaires parce que le coût de la vie dans le pays est devenu très élevé.
Sur le plan économique, son Premier ministre, Oumar Tatam Ly, banquier de son état, est attendu pour jouer un grand rôle en procédant à l’assainissement des finances publiques, par la proposition des solutions adéquates pour renflouer les caisses de l’Etat. A ce niveau, l’activité minière devrait jouer un grand rôle. L’exploitation de ces ressources à ciel ouvert (or, ciment, fer…) devraient peser dans la balance. A cela devraient s’ajouter le coton et autres produits agricoles. La culture, l’artisanat et le tourisme devraient également contribuer à la relance de l’économie à travers la réouverture des sites touristiques aux visiteurs étrangers. M. Ly devrait aider à mobiliser les 3 milliards et demi d’euros promis par la Conférence des bailleurs du Mali à Bruxelles et aussi ouvrir le pays à de nouveaux investisseurs tout en préservant les intérêts du pays avec un code des investissements favorable à tous ceux qui veulent contribuer à développer le Mali.
IBK soutient que «l’Ecole restera à l’école»
L’un des chantiers difficiles que IBK est appelé à affronter et qu’il connait bien, c’est la crise de l’Ecole qui souffre de plusieurs maux. Notamment les grèves intempestives des élèves et enseignants sur toute l’étendue du territoire et aussi le faible niveau des enseignements. Cette crise scolaire, si elle n’est pas bien managée, constitue une véritable bombe à retardement. On se souvient que la fameuse Révolution de mars 1991 avait pris ses racines dans la cour de l’école. Aujourd’hui, la petite corruption, qui se traduit à travers la vente des notes et de diplômes, de même que le favoritisme, le clientélisme, doit attirer l’attention du nouveau locataire de Koulouba. «Elle ne sera plus tolérée dans la rue. Nous mettrons fin aux achats de diplômes, de même qu’au commerce des épreuves d’examen».
Depuis la chute du général Moussa Traoré, l’école malienne a pris un sacré coût à travers les grèves. L’Université qui a ouvert ses portes, quelques années après la révolution estudiantine de mars 1991, a vu le nombre de ses étudiants croître, d’année en année, avec des besoins grandissants. Ce secteur nécessite, de nos jours, de gros investissements afin que les conditions soient réunies pour relever le niveau de l’étudiant malien.
En mettant donc au centre de ses projets la lutte contre la corruption, le président Keïta se dit conscient de l’ampleur de la tâche. La guerre contre la corruption ne sera pas gagnée tout de suite, dit-il avant d’ajouter que «si nous ne la gagnions pas, nous aurons manqué de prendre en compte une des leçons majeures des crises de régime, d’Etat et de société que nous venons de traverser».
La sécurité à tout prix !
Après l’Accord de Ouagadougou signé par les groupes armés et l’équipe de transition, le Mali se voyait plus ou moins dans une logique de sortie de crise jusqu’à ce qu’en septembre, le Mouvement national de libération de l’Azawad indique, dans un communiqué, qu’il ne reconnaissait plus l’accord signé avec le gouvernement. Cela change la donne dans la mesure où les troupes du MNLA restent toujours cantonnées à Kidal. Pour sa première sortie internationale, le nouveau président du Mali a appelé les pays de la zone saharienne à constituer une force régionale multilatérale pour intervenir rapidement contre la menace islamiste dans cette partie de l’Afrique. Il s’agit de se référer sur les incidents au Niger, en Libye et en Tunisie pour en comprendre la nécessité.
La mission de l’ONU sera présente encore plusieurs mois pour aider le Mali à se stabiliser. Mais après son retrait, le pays devrait être en mesure d’assurer sa propre sécurité. Un challenge qui passe également par la réforme de l’Armée qui a subi aussi les effets collatéraux de la crise politique. Et dans le processus de la réconciliation nationale, IBK devrait concentrer une bonne partie de ses efforts à l’Armée. Réconcilier les militaires avec eux-mêmes, mais aussi avec le peuple…
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