S’exprimant jeudi, lors d’une conférence mondiale à Addis-Abeba sur le thème, « Des médias pour la démocratie : Le journalisme et les élections en périodes de désinformation », Mme Songwe déclare que les médias ont un rôle important à jouer pour instaurer la responsabilité dans le processus démocratique.
« Nous avons vu par exemple comment, ces dernières années, les médias dynamiques contribuent de plus en plus à apporter de la transparence dans le processus de vote et de compilation des sondages dans le monde entier », dit-elle.
« Si nous pensons à la démocratie comme un moyen de sortir plus de 400 millions de personnes en Afrique qui vivent dans une pauvreté extrême, de réduire la mortalité maternelle et infantile sur le continent, de garantir à chaque enfant africain une éducation et à chaque jeune un travail décent, alors il est important de responsabiliser les agents comme les médias qui contribuent à renforcer la démocratie ».
Elle poursuit : « Les médias, en tant que 4ème domaine, ne peuvent nous aider à atteindre nos Objectifs de développement collectifs que s’ils ont la liberté d’opérer ».
Malheureusement, indique Mme Songwe, la liberté de la presse limitée continue de saper la capacité des médias à assumer ce rôle.
« Malheureusement, certains journalistes sont victimes de la répression. Ils sont assassinés, arrêtés, détenus et censurés », avoue-t-elle, en déplorant le blocage de l’accès à Internet par certains gouvernements, affirmant que cela porte atteinte à la liberté de la presse et à la productivité.
Entre janvier 2018 et avril 2019, 88 journalistes ont été tués dans l’exercice de leurs fonctions dans le monde. Onze d’entre eux venaient d’Afrique, notamment quatre de Somalie, trois de la République centrafricaine, deux de la Libye, un de la Sierra Leone et un du Ghana, un journaliste d’enquête qui avait découvert la corruption dans le football.
Dans l’Indice mondial de la liberté de la presse 2019, seuls deux pays africains figurent dans le top 30 ; la Namibie et le Ghana se classent respectivement 23 et 27 sur les 180 pays étudiés.
Néanmoins, il est important de reconnaître que certains de nos pays progressent dans le domaine de la liberté de la presse, notamment l’Éthiopie, qui est passée de la 150ème position en 2018 à la 110ème en 2019, informe Mme Songwe.
Elle félicite le Gouvernement éthiopien pour cet exploit. Pour la première fois en plus de dix ans, aucun professionnel des médias n’a été emprisonné au cours de l’année 2018 dans le pays.
« Mais l’Éthiopie peut faire mieux et j’aimerais voir ce pays parmi les 20 meilleurs », ajoute-t-elle.
L’Indice de gouvernance Ibrahim 2018 fait apparaître une détérioration des tendances sur le continent en ce qui concerne la liberté d’association, les droits et libertés civils et la liberté d’expression.
« Au-delà de la garantie des libertés pour les médias, nous devons encore faire plus pour leur donner les moyens de promouvoir la transparence et la responsabilité, indispensables à la démocratie pour instaurer une bonne gouvernance. Les médias ont besoin d’accéder à l’information pour pouvoir informer les citoyens et exercer collectivement leurs responsabilités », affirme la Secrétaire exécutive de la CEA.
Mme Songwe dit : « Alors que nous plaidons pour une liberté de la presse accrue, nous devons continuer à insister sur la nécessité d’un journalisme responsable, en particulier à l’ère du numérique, où les fausses informations sont devenues une menace majeure ».
« On a beaucoup parlé des dangers des médias irresponsables et des menaces qu’ils font peser sur la paix et la sécurité en particulier. Il est important que nos pratiques journalistiques actuelles ne portent pas atteinte aux libertés pour lesquelles nos prédécesseurs se sont battus avec sueur et parfois en versant du sang ».
Elle met au défi la presse d’être objective, honnête et novatrice dans l’exercice de ses fonctions.
« C’est le seul moyen de renforcer la confiance et de définir ensemble la voie d’une démocratie qui porte ses fruits pour tous », révèle Mme Songwe.
Elle félicite le Gouvernement du Ghana d’avoir adopté la loi sur le droit à l’information en mars de cette année.
C’est une démonstration importante de l’engagement du Gouvernement à se soumettre à la responsabilité, dit Mme Songwe.
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