L’un des défis majeurs de l’agriculture sénégalaise est sans nul doute la transformation des produits post-récoles. Soucieux d’y apporter une réponse, l’Etat du Sénégal a mis en place l’Institut de technologie alimentaire (ITA). Selon Fallou Sar, son Directeur des relations extérieures, l’Institut s’intéresse à tout ce qui vient après la production. « Maintenant, dans les missions que l’Etat lui a confié, il appartient à l’ITA de trouver des technologies et des innovations appliquées dans les activités post-récoltes et qui peuvent ajouter de la valeur sur nos produits et même servir à la création et au développement des petites et moyennes industries (PMI). C’est pourquoi, depuis sa création en 1963, l’ITA est toujours logé dans le ministère des industries et il en est sorti rarement », explique M. Sar, chercheur et responsable de l’unité en charge de tout ce qui est céréales.
Mais en plus de la mission d’innovations, de développement de techniques de stockage, de transformation et de conservation, des produits agricoles, l’ITA assure aussi la mission de transférer ces innovations et technologies auprès des utilisateurs que sont les producteurs, les transformateurs, les industriels, les petits porteurs de projets, toujours dans le domaine de l’agriculture, explique le collaborateur du Directeur de l’ITA, Mamadou Amadou Seck.
Formation qualifiante
En plus de faire du transfert de technologie une priorité, l’ITA fait de la formation une surpriorité. « Il existe un seul moyen pour faire ce transfert de technologie et d’innovation. C’est la formation. Ce qui veut dire que nous avons une mission également de formation de tout ce qui est corps de métier relatif à l’alimentation. C’est pourquoi, nous disposons aujourd’hui d’un centre de formation aux métiers de l’alimentation. Maintenant, contrairement aux Universités et aux instituts de formation, nous faisons ce qu’on appelle la formation qualifiante. Aujourd’hui, quand vous êtes formés par l’ITA pour une durée d’une à deux semaines, vous êtes opérationnel et capable de transformer, produire et vendre. C’est notre différence avec les formations académiques qui dispensent un cursus assez long », a-t-il détaillé. Parallèlement, l’ITA dispose d’un incubateur d’entreprises. « Nous nous sommes rendus compte que les porteurs de projets financés par l’Etat ou les autres organismes n’ont pas assez de moyens pour prendre en charge l’ensemble des aspects pour conduire les activités de l’entreprise. Et le peu de budget en leur possession, ils le dépensent dans l’achat d’équipements, la location d’un local, et tout ce qui est formation.
Cependant, ils oublient souvent de prendre en compte la question de la commercialisation. Or, un produit, s’il n’est pas connu, quelle que soit sa qualité, si vous ne le mettez pas en valeur, il ne pourra pas être écoulé », explique le Directeur des relations extérieures de l’ITA. Et cette situation fait que la plupart des entreprises ont des problèmes de remboursement des financements. « C’est pourquoi les agences dédiées à l’accompagnement des jeunes ne prospéraient pas et on en avait beaucoup avec le FNPJ, l’ANPEJ… », a-t-il confié.
Incubateur d’entreprises
Conscient de ces difficultés, l’ITA qui dispose d’unités de recherche, de formation et de transfert, a décidé de les mettre à la disposition des entreprises. «C’est pour dire que 80% de notre mission c’est la formation pour créer la recherche et l’innovation. Ainsi, les innovations technologiques que nous créons, nous les mettons à la disposition des bénéficiaires via la formation et l’incubation. On ne peut pas prendre tout le monde parce que la capacité d’accueil n’est pas grande et le personnel dédié n’est pas en grand nombre. Mais pour le peu de postulants qu’on peut prendre, nous les hébergeons en leur offrant le local, tout le personnel nécessaire, l’ingénieur et même peut être le scientifique pour tout ce qui est process et aspect technique. On leur offre aussi tout ce qui est technologie ou innovation qui est un intrant extrêmement important pour le développement de l’entreprise. En plus de cela, nos équipements qui sont des outils de production, nous les mettons à leur disposition », a-t-il expliqué. Si l’ITA voit les choses en grand, c’est qu’il dispose des moyens de ses ambitions. Car dit-il, « nous avons un pôle de laboratoire qui dispose d’un laboratoire de chimie alimentaire, un laboratoire de microbiologie alimentaire, un laboratoire dédié à tout ce qui est micro toxine comme l’aflatoxine contenue dans l’arachide et également un laboratoire phytosanitaire qui permet, quand vous devez exporter ou mettre sur le marché un produit, de vous dire que vous avez ou non la qualité sanitaire requise pour ce produit ».
Et les résultats sont tels que M. Sarr appelle les porteurs de projets à se rapprocher de l’ITA. « Nous avons aujourd’hui suffisamment de résultats qui ne sont pas encore valorisés et nous demandons aux jeunes et aux porteurs de projets de venir vers l’ITA parce que cela peut aider le gouvernement dans sa politique d’emploi des jeunes, mais aussi d’activités génératrices de revenus pour les femmes », a-t-il assuré.
Laboratoire accrédité
En plus d’aider dans la transformation et tout ce qui va avec, l’ITA dispose d’un pôle laboratoire pour offrir des services pour l’accompagnement de tout ce qui a trait à la transformation et la valorisation des produits agricoles. Parce que, selon M. SARR, un produit que vous mettez au point avant de le mettre à la disposition des consommateurs, il y a un besoin de vérifier sa qualité et sa conformité et c’est grâce à ce laboratoire que cela se fait. « C’est pourquoi aujourd’hui, beaucoup d’industriels et d’entrepreneurs utilisent cet outil de l’ITA pour leurs produits réservés au marché local, mais également aux produits destinés à l’exportation. L’ITA est aujourd’hui, le seul laboratoire en Afrique qui dispose depuis deux ans d’une accréditation internationale dans le domaine des aflatoxines. Ce qui fait que même l’Union africaine souhaite faire de ce laboratoire (ITA) un institut de référence en matière d’analyse d’aflatoxine. (Cas d’école le problème de l’arachide avec l’exigence chinoise de designer l’ITA pour les analyses de l’aflatoxine) », a-t-il salué.
Dieynaba Badiane figure de proue de l’ITA
La présidente du GIE Casa Technologie Alimentaire de Bignona, Dieynaba Badiane est connue comme la spécialiste de la production et la mise aux normes de pleurotes à Bignona, dans la région de Ziguinchor. Les pleurotes sont des champignons comestibles, très appréciés, mais difficiles à domestiquer. Grâce à l’encadrement de l’ITA et à son accompagnement, Dieynaba Badiane a fini par ancrer son projet de production de pleurotes, devenue une référence. «J’ai démarré avec 10 mille francs comme capital. J’ai eu la chance que l’ITA me soutienne avec des semences gratuites pour commencer », se souvient-elle.
Le même satisfecit revient avec les boulangers du Sénégal qui ont pu incorporer dans la conception du pain, une proportion de farine de céréales locales grâce à l’appui de l’ITA.
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