La Microfinance est un succès, mais elle ne touche encore qu’une très faible proportion des populations non bancarisées. Elle se caractérise par la proximité géographique et le lien privilégié de confiance avec les cibles ainsi que par la souplesse des conditions d’accès et d’utilisation des services offerts. De ce point de vue, elle est plus apte à offrir des services financiers à des populations à faibles revenus et qui ne sont pas toujours en mesure d’offrir des garanties nécessaires pour l’accès au crédit.
«Nous savons tous que la cible de la Microfinance est constituée des populations vulnérables n’ayant pas accès aux services financiers classiques. Ceci montre nettement que l’inclusion financière de ces populations passe par la Microfinance», explique le Directeur de la Microfinance, Moussa Dieng.
Pour illustrer son propos, il révèle que la Direction de la Microfinance vient de réaliser une étude sur le thème : «La portée des interventions des Services financiers décentralisés auprès de leurs bénéficiaires. »
Cette étude menée sur un échantillon de seize (16) Systèmes financiers décentralisés (SFD) répartis dans sept (07) régions du Sénégal, a été réalisée dans le cadre de la mise en œuvre du Plan d’action de la Lettre de Politique Sectorielle de Développement (LPSD) du Ministère dans son Objectif spécifique 3 : « Améliorer la qualité de l’offre des Services financiers sociaux et solidaires et ses filets de distribution. »
L’étude avait pour objectif, rappelle-t-il, de mesurer les performances socio-économiques engendrées par les SFD sur leurs bénéficiaires et leurs environnements, mais aussi de mesurer l’impact de l’action de la contribution de ceux-ci dans la création d’emplois et la lutte contre la pauvreté et identifier les défis qu’ils rencontrent dans la réalisation de leurs missions.
Il ressort de cette étude que les SFD constituent des acteurs majeurs dans la lutte contre la pauvreté, et participent au développement socio-économique au sein de leurs différentes localités d’implantation et que 97% des bénéficiaires interrogés reconnaissent que l’activité des SFD impacte positivement leur situation sociale et économique.
Le Directeur de la Microfinance tient à souligner que la Microfinance occupe une place centrale dans la Stratégie nationale d’inclusion financière (SNIF), document sur lequel le Ministère de la Microfinance et de l’Economie solidaire a activement contribué à son élaboration, sous l’égide du Ministère des Finances ainsi que la Banque centrale des Etats de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO).
La portée d’une finance inclusive
L’Observatoire de la qualité des services financiers (OQSF) qui s’est engagé dans la promotion de l’inclusion financière, préalable à l’inclusion sociale qui est l’axe 2 du Plan Sénégal émergent (PSE), s’est engagé aussi à matérialiser cette ambition. Le Secrétaire exécutif de l’OQSF, M. Habib Ndao, en convient : « Dans un contexte marqué par le combat contre les inégalités sociales définies par les pouvoirs publics, la protection des clients des services financiers et la lutte contre l’illettrisme financier demeurent une préoccupation majeure, en ce sens qu’elle constitue un levier d’inclusion financière et sociale », justifie M. Ndao.
Le Secrétaire exécutif de l’OQSF rappelle que les orientations du PSE mettent en avant la portée d’une finance inclusive comme un moyen efficace pour lutter contre l’exclusion et la pauvreté, surtout au niveau des couches les plus vulnérables de la population, afin de jeter les bases d’une économie émergente et inclusive.
Ces orientations reposent sur trois axes essentiels, à savoir : la promotion de l’accès aux services bancaires de base, une tarification transparente et responsable, et une protection efficiente des clients et usagers du secteur financier.
« Ces orientations sont en phase avec le cadre d’intervention de l’Observatoire de la Qualité des Services Financiers (OQSF) qui accorde un intérêt particulier au renforcement de l’inclusion financière à travers la promotion du Low Income Banking (LIB) et du Low Income Insurance (LII), ainsi qu’à la protection efficiente des usagers de services financiers à revenus faible », précise Ndao
A ce titre, il note que l’Observatoire s’investit invariablement dans sa mission d’accompagner les usagers, les opérateurs financiers pour protéger l’écosystème, les régulateurs et les pouvoirs publics dans la formulation et l’élaboration des textes régissant le secteur, en vue d’une plus grande inclusion financière, mais également de préservation de la confiance des populations à l’endroit du système financier. Ceci, en formulant des recommandations issues d’études, d’enquêtes, d’ateliers de partage, en déroulant, au profit de cibles diverses, des sessions de formation en éducation financière et des rassemblements publics d’information et en favorisant le traitement diligent des dossiers de médiation.
Habib Ndao explique que, dans le cadre des nouvelles orientations qui préparent les prochaines étapes d’un déploiement stratégique de l’Observatoire, tel que préconisé par les hautes autorités, l’OQSF aura notamment comme missions d’assurer la supervision de la conduite du marché, la surveillance des services offerts à la clientèle pour une meilleure protection, de veiller à un écosystème financier robuste et crédible auprès des populations, et d’accompagner le secteur informel à se formaliser pour un accès plus facile aux financements, à la commande publique et aux marchés extérieurs.
La belle performance du secteur
L’observatoire se chargera aussi de promouvoir le financement des startups en poussant l’esprit entrepreneurial, d’inciter les opérateurs à mettre à la disposition du public des produits et services adaptés à leur besoin, mais également à améliorer la qualité de leur contribution au financement de l’économie.
Néanmoins, Habib Ndao soutient que l’état actuel de la Microfinance au Sénégal favorise bien une inclusion financière permettant de lutter davantage contre les inégalités sociales.
« Pour un taux global d’utilisation aux services financiers (taux d’inclusion financière) de près de 78%, le secteur de la Microfinance y contribue à plus de 20%, contre seulement 19% pour les banques. Le reste est porté par la monnaie électronique », affirme-t-il.
Il a aussi salué la belle performance du secteur de la Microfinance qui contribue au financement de l’économie nationale à hauteur de 40 milliards de FCFA tous les mois. Un dynamisme réel corroboré par la Banque centrale des Etats de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO).
Dans une note publiée le 5 août 2022 sur la situation de la Microfinance dans l’Union monétaire ouest-africaine (Umoa) au 31 mars 2022, l’institut d’émission monétaire renseigne qu’au Sénégal, le montant des dépôts collectés a augmenté de 12,5% et s’est établi à 52.401,7 millions de FCFA. Aussi, l’encours des crédits des SFD a connu une hausse de 10,0%, soit 47.417,3 millions de FCFA en valeur absolue.
En outre, la Banque centrale précise que la clientèle masculine des SFD a bénéficié de 54,3% des crédits. La clientèle féminine et les groupements bénéficient respectivement de 20,6 et 25,1% des financements.
Toutefois, le Secrétaire exécutif de l’OQSF souligne que « ces performances de la Microfinance, quoique appréciables, ne sauraient cacher un certain nombre de défis à relever pour accroitre son impact dans l’inclusion financière des populations ».
Au nombre des challenges à relever, Habib Ndao cite l’allégement des taux d’intérêts, dont le coût du crédit est exorbitant, l’accessibilité physique des points de services, la qualité de la relation, la digitalisation des opérations et services, le manque de stratégie orientée vers une meilleure connaissance de la demande, la faiblesse du niveau d’éducation financière des membres sociétaires, les méthodes de recouvrement non abusives, non attentatoires à la dignité des sociétaires.
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