La guerre civile au Liban (1975 – 1990) a accentué l’arrivée de nombreux libanais à Ouagadougou, rejoignant de vieilles familles (les Fadoul et Hage), installées de longue date au pays des «hommes intègres».
Aujourd’hui, la communauté libanaise du Burkina Faso compte environ 1 500 personnes vivant en majorité à Ouagadougou et dans les grandes villes. 65% d’entre eux possèdent la double nationalité, libanaise et burkinabè, obtenue après 10 ans de résidence ou en se mariant avec un conjoint burkinabè, selon le Consul Joseph Hage, arrivé à l’âge de 16 ans au Burkina.
La majorité des Libanais du Burkina sont dans le commerce et l’industrie. Ils ont pris le contrôle de certains secteurs (boulangerie, supermarché) où ils règnent en maîtres incontestés. «Les Libanais emploient près de 10 000 travailleurs locaux, directement, tous secteurs confondus. Si on estime qu’un salaire nourrit une dizaine de personnes, presque 100 000 Burkinabè vivent grâce aux emplois que nous avons créés», explique le Consul.
Dans le business, les ténors sont les groupes Fadoul (commerce, BTP, librairie), Hage (BTP), Scimas (commerce), Hajjar (boulangerie), Mégamonde (transport).
Fadoul et Hage en tête
Présent en Afrique depuis les années 1900, la famille Fadoul est dispersée entre le Bénin, la Guinée, Bamako et le Mali. Du BTP, le groupe s’est diversifié dans la distribution, l’électronique, la librairie, l’industrie, l’audiovisuel. Avec +4 000 employés, le groupe, créé en 1966, est un des plus gros employeurs locaux. Et il s’est développé dans d’autres pays africains.
Quant à Joseph Hage, il s’est installé au Burkina comme commerçant en début 1960. Puis, il se lance dans l’importation des matériaux de construction et plus tard la production industrielle, la distribution des matériaux de construction.
Derrière le duo, émerge Nasser Basma. Depuis début 2000, on le remarque dans les motocyles, puis dans les climatiseurs, appareils électroménagers, matériel de télécoms… Il a créée un holding à Hong Kong et une filiale Mégamonde Mali. Depuis 2014, sa société Star Technologies (sécurité digitale) est le représentant officiel de la multinationale Oberthur.
Dans l’opinion, le sentiment partagé est «la protection et les passe-droits» dont semblent bénéficier les hommes d’affaires libanais. «J’ai l’impression que tout leur est permis», explique un jeune commerçant de Rood woko.
La récente affaire, qui a défrayé la chronique, opposant la Banque BCB et la société Mégamonde. Elle porte sur la disparition de biens commerciaux, évalués à des milliards FCFA. Même si l’affaire s’est conclue par un protocole d’accord de règlement définitif qui les opposait en Justice, nombreux sont ceux qui crient à l’incompréhension. Aussi, les noms de certaines sociétés appartenant à des familles libanaises reviennent, souvent, dans des cas de fraude fiscale.
Récemment, la presse locale a fait état «du silence et de la passivité coupables» des Autorités à propos d’un redressement fiscal d’une société de commerce d’un Libanais, d’environ 8 milliards FCFA, après les premières estimations.
Aussi, les populations locales estiment (à tort ou à raison) qu’une connexion forte entre les hommes d’affaires libanais et le pouvoir politique. «Ce sont des amalgames. Vu le niveau de nos affaires, on est amené à rencontrer tout le monde et on ne peut fermer nos portes à une Autorité», justifie un opérateur économique libanais.
Malgré les critiques, la communauté libanaise s’est bien intégrée au tissu socio-économique burkinabé. Georges Fadoul est, depuis longtemps, affublé du patronyme ‘’Ouédraogo’’, pour signifier sa bonne intégration. Lui et certains de ses concitoyens sont des mécènes dans l’humanitaire, le sport et la culture.
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