Le Consensus de Monterrey de 2002 sur le financement du Développement a établi que les ressources financières extérieures ne permettraient pas à elles seules d’atteindre les OMD et qu’il était nécessaire de mettre en place des stratégies de mobilisation de ressources intérieures, notamment celles publiques plus stables, avec un effet limité sur la dette publique et susceptibles de créer une plus grande responsabilité dans la gestion de ces ressources. À l’image des pays développés, les pays en développement doivent s’appuyer essentiellement sur les ressources intérieures pour financer leur économie.
Pour financer les programmes de développement, le Sénégal a jusqu’ici compté grandement sur les flux extérieurs notamment l’Aide publique au Développement (APD) et les Investissements directs étrangers (IDE). La baisse de l’APD et des IDE montre que le Sénégal doit compter sur les ressources intérieures pour financer ses programmes de développement.
Le Gouvernement du Sénégal a compris l’intérêt de la mobilisation de ressources intérieures et a intégré cette dimension dans le Plan Sénégal Emergent, en élevant au rang de priorité la mobilisation de ressources intérieures.
Au vu des récents développements économiques et sociaux que connait le Sénégal, la mobilisation de ressources intérieures signifie l’accroissement optimal des recettes budgétaires, une hausse significative de l’épargne intérieure et son orientation vers des investissements plus riches en emplois productifs et en flux d’exportations.
Grâce au cadre politique et institutionnel mis en place et à la performance économique des dernières années, les ressources intérieures (publiques et privées) ont progressé continuellement, mais demeurent insuffisantes pour assurer le financement des programmes de développement et corriger le déséquilibre extérieur structurel de l’économie.
Les principaux défis à relever pour booster les ressources intérieures portent sur la stabilité du cadre macroéconomique, la formalisation du secteur informel, la réforme des systèmes de retraite, le développement du secteur financier à travers l’instauration d’une culture financière et la réduction des transactions par espèces.
Dans ce cadre, les établissements financiers doivent accélérer leur maillage du territoire national avec des produits innovants, notamment les plans d’épargne actions au niveau des banques ou des sociétés d’assurance.
En outre, la politique de mobilisation de ressources intérieures doit être une composante de la stratégie de croissance et de développement du pays pour éviter de disposer d’une épargne privée oisive et d’une épargne publique qui affecte la compétitivité de l’économie.
A ce titre, le financement intérieur, d’un montant de 557,186 milliards de FCFA prévu dans la loi de finances de 2015, représentant 57,9% du volume de financement des investissements publics, traduit la poursuite de l’effort de financement interne des projets et programmes de développement par les moyens propres.
Ces ressources internes prennent en charge les dotations budgétaires aux projets du PSE pour un montant de 166 milliards de FCFA, les contreparties aux financements extérieurs des projets et programmes de développement pour un montant de 77,042 milliards de FCFA, les engagements en cours constitués de projets et actions financés entièrement par l’Etat pour un montant de 237,144 milliards de FCFA (conseils interministériels de développement et autres engagements financiers de l’Etat) et la réserve de précaution d’un montant de 52 milliards de FCFA pour financer des projets du PSE dès la disponibilité des études y relatives.
Le renforcement de la mobilisation des ressources intérieures offre beaucoup d’avantages parmi lesquels on peut citer l’amélioration de la capacité de l’Etat à fournir des services, à se doter de cadres de politiques nécessaires pour piloter des programmes de développement à long terme et à renforcer la capacité de l’appareil d’Etat.
Au regard des besoins substantiels en ressources financières du Sénégal et du potentiel énorme de mobilisation, il y a véritablement assez de possibilités d’accroître les recettes intérieures à travers une meilleure gestion des finances publiques, avec notamment une poursuite de la réforme fiscale et le renforcement des capacités administratives.
Pour ce faire, le financement de l’émergence doit plus reposer sur les finances intérieures et se bâtir sur les stratégies ci-après :
- élargir l’assiette fiscale et augmenter les recettes fiscales ;
- utiliser les obligations de la Diaspora et diriger les transferts d’argent (titrisation des envois d’argent et des obligations) vers le financement du développement ;
- orienter les actions philanthropiques intérieures vers le développement (entre 2002 et 2007, SONATEL a fait un don de 2 millions de dollars pour appuyer le secteur de la santé) ;
- exploiter les fonds de pension et d’assurance ;
- accroitre les rentes tirées des ressources naturelles et freiner les flux financiers illicites.
Ainsi, serait-il également cohérent de travailler sur un label « made in Sénégal » en associant voire privilégiant le secteur privé national dans la réalisation des 27 projets phares du PSE. Des mécanismes tels que les partenariats public-privé basés sur les « joint-ventures » entre les entreprises nationales et celles étrangères orientées dans les secteurs stratégiques pourraient contribuer à accroitre l’émergence.
Le type de transformation économique que le Sénégal envisage d’impulser ne verra le jour sans des ressources adéquates et suffisantes. La mise en œuvre du PSE est un défi de taille pour garantir une croissance durable. Comme étape essentielle, l’Etat doit revoir sa politique fiscale, prévenir et lutter contre les flux financiers illicites, renforcer le secteur financier, appuyer la productivité des entreprises.
Toutefois, ces réformes seront peu concluantes s’il n’y a pas de gouvernance économique et d’inclusion, une reddition des comptes par l’Etat et la transparence, une protection sociale et la disponibilité des services publics et des infrastructures nécessaires.
Aussi, les organes chargés de la gestion des finances publiques doivent-ils faire l’objet d’une restructuration et être modernisées pour satisfaire aux exigences des nouvelles priorités du PSE.
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