Dans l’imaginaire du Sénégalais lambda, l’élevage, c’est juste la volaille dans la basse-cour ou les petits ruminants dans l’enclos du paysan ou l’éleveur Peulh avec ses têtes de bétail à la recherche de pâturages ou enfin, avant la Tabaski, le fameux mouton pour lequel il faut suer sang et eau pour en disposer. Bref, c’est ça, l’image d’Epinal du secteur…
Et pourtant, c’est un secteur économique au vrai sens du terme avec un cheptel ruminant évalué à quelque 800 milliards Fcfa, des emplois représentant 25% de la population active, une contribution de 4% de la formation du PIB. C’est dire que ça pèse assez lourd, dans la balance…
Mais dans les faits, on ne sent pas une prise en charge notable du secteur dans les politiques publiques. C’est comme s’il était laissé à lui-même. Dans le monde rural, l’Elevage est le parent pauvre à côté de l’Agriculture, chouchouté par l’Etat et les bailleurs de fonds.
Mais ces dernières années, on a vu de braves gens s’époumoner pour structurer ces différents sous-secteurs. D’abord, au niveau de l’aviculture par l’interdiction de l’importation de la volaille étrangère, coïncidant avec la promotion du poulet et des œufs locaux. Toute une industrie y a émergé dans le sillage de la réussite du visionnaire Babacar Ngom qui a fait de Sedima, un vrai fleuron. Aujourd’hui, on parle d’une production nationale de 20 millions de poulets, soit en valeur, +100 milliards Fcfa.
Ici, le gros problème, c’est l’aliment de volaille, le maïs, pour l’essentiel importé qui rend notre poulet non-compétitif alors que le potentiel d’exportation est énorme, notamment dans les pays du Golfe, avec notre label halal. Il nous faut maintenant cultiver davantage de maïs pour faire face à la forte demande.
Ensuite, c’est Bagoré Bathily, un jeune vétérinaire qui a cru en la valorisation du lait de traite et en a fait son dada. Il est allé ouvrir sa bien-nommée «Laiterie du Berger», dans la Vallée, à côté des zones de production et de collecte de lait tout en participant à la formation et à l’éveil des consciences de nos parents éleveurs, plutôt en rade de la modernité. Tout un challenge pour leur faire intégrer les vertus de l’hygiène, de la traite et la conservation du lait frais, son transport sécurisé au niveau des points de collecte…
Le Sénégal est quand même un grand pays d’élevage avec 3 millions de tête pour 12 millions, à peu près le même ratio que la France. Mais les contraintes de l’élevage moderne, ses besoins de transformation pour plus de valeurs ajoutées sont autrement plus complexes et exigent un vrai savoir-faire. Il y a à gagner la bataille de la transformation du lait local, trop défavorisé par l’importation de la poudre de lait. Soit 2/3 des 360 millions de litres de laits consommés au pour une valeur de 65 milliards Fcfa.
Pour la filière bétail et viande, c’est l’approvisionnement en moutons de Tabaski qui occupe le devant de la scène avec +700 000 têtes à abattre. Ce qui interpelle l’importation de moutons dans la sous-région, la reconstitution du cheptel, la modernisation des abattoirs, l’allocation des ressources foncières dans le cadre d’une répartition territoriale plus équitable entre l’Agriculture, l’Elevage et de la forte pression démographique, dans la région de Dakar…
Autant de questions de fond qui interpellent les acteurs, les membres de la Grappe Elevage, Industries et Productions animales et le ministre de tutelle. D’ores et déjà, REUSSIR a joué sa partition même si aucun acteur n’a souhaité nous accompagner sur le plan commercial. Pour un secteur qui veut davantage de visibilité…
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