Le titre «l’Afrique dans l’industrie des idées, participer à la bataille ou perdre la guerre» du confrère Abdou Diaw d’African Business Journal, laisse songeur.
En effet, si on est d’accord sur l’existence d’un lien naturel de cause à effet entre les problèmes existant dans divers domaines et les dynamiques de résolution de ces problèmes, l’Afrique devrait, en principe, être un des continents les plus pourvus en Think Thank.
La réalité est, malheureusement, bien éloignée de ce raisonnement logique. En effet, sur les 5 500 Think Thank existant dans le monde, 420 relèvent de l’Afrique au sud du Sahara contre 1200 pour l’Europe et 1 900 pour l’Amérique du Nord.
Pour savoir s’il ne s’agit pas là d’un énième effet de mode afin de suivre un concept né ailleurs, sans lien direct avec les spécificités de nos environnements, on s’aperçoit qu’il s’agit bien d’une dynamique souhaitable de brainstorming géant et constant dont le format al’avantage de partir des problèmes spécifiques et locales pour leur proposer les solutions les plus appropriées.
C’est à ce point vrai que la Banque Mondiale, à qui on a beaucoup reproché, il n’y a pas si longtemps d’avoir imposé, pendant un moment, des solutions, en général, inadaptéesà nombre de pays en développement (notamment africains), plaide aujourd’hui pour l’effervescence de ThinkThank très localisées.
En effet, elle a annoncé, dans le cadre de sa nouvelle stratégie pour l’Afrique, validée en mars 2011, qu’elle souhaitait des échanges plus soutenus avec les centres de production de connaissances, concentrés sur des problématiques propres au continent.
D’ailleurs, il a été organisée, il y a quelques mois, à la Banque Mondiale à Dakar, en même temps que dans 20 autres villes africaines, une vidéo conférence mettant en relais la Vice-présidente Afrique de cette institution financière et les responsables de Think Thank du continent.
Au sortir de la dite journée, Abdoulaye Rokhaya Wane, président de Leadership Afrique,l’un des centres de recherchesinvités à cette rencontre, nous redisait toute la détermination de la Banque à désormais intégrer le produit de leurs recherches à l’élaboration de ses projets et programmes à l’endroit du continent. Son intention est également de contribuer à élargir la diffusion des quelques 90 études annuelles, résultats de ces réflexions vers tous les acteurs les plus intéressés.
L’idée est tant de s’inspirer d’expertises locales pour la résolution de problèmes locaux plutôt que de transposer ces solutions, partout ailleurs en Afrique ou dans le monde, où elles s’avèreront répondre à des problématiques de même ordre.
Mais, il est également question pour la Banque Mondiale de s’investir dans le financement des recherches de ces Think Thank africains sans entraver toutefois leur autonomie et leur originalité de réflexion.
C’est dans le même ordre d’idées que s’inscrit, sans aucun doute, le «ThinkThank Initiative», piloté par l’International Developpement Research Center du Canada et financé par la fondation Bill et Melinda Gates, qui sur 5 ans, prévoit de dégager, progressivement, une enveloppe de 30 millions de dollars à l’endroit de24 ThinkThank africains, rigoureusement sélectionnés à cet effet.
Dans la mesure où nombre de nos chefs d’Etats et de Gouvernement cherchent à s’investir dans le «mieux gérer» afin de gagner la course à l’émergence qu’ils se sont imposés, il va de soi que les Think Thank équivalent, dans notre zone francophone, à l’appellation «groupes de réflexion». Ils constituent un moyen intelligent d’alimenter la vision de développement stratégique du continent.
Aussi, se présenter, à l’image des institutions internationales, comme un client constamment demandeur des résultats des travaux de ces centres de réflexion, participer à la vulgarisation de ces résultats, sans volonté de mainmise aucune, leur commander des travaux sur les questions les plus brûlantes de l’heure, les intégrer, selon leurs spécialités, à toutes les questions prioritaires de développement national, c’est, je pense, l’attitude que privilégierait tout gouvernement conscient de l’efficacité des intelligences agrégées en termes de performances dans les organisations, quelles qu’elles soient.
Je vais ici arrêter mon propos en vous remerciant infiniment de m’avoir lu, si c’est le cas, chers gouvernants du Sénégal, tout en vous donnant rendez-vous pour la prochaine adresse à votre intention spéciale, lors de tous les autres numéros. Mais m’aurez-vous seulement entendu ?
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