Quelle est votre appréciation de l’état de développement socio-économique du groupe de pays ouest-africains dont vous avez la charge?
D’une manière globale, la crise financière mondiale continue d’avoir des effets pervers sur les économies des pays développés. Ceci est reflété par la turbulence du marché des capitaux et la fluctuation des devises, en particulier dans l’Euro zone et la croissance limitée aux Etats-Unis. Tout cela est symptomatique de la faiblesse des prévisions économiques dans les pays développés. Cette situation redéfinit les dynamiques dans le marché mondial et crée de nouvelles plateformes économiques sur son passage, y compris pour l’Afrique de l’Ouest.
En contraste, il est prévu une croissance de l’économie africaine à 6% en 2012. L’Afrique, considérée jadis peu attractive pour l’investissement, est maintenant très attractive pour beaucoup d’investisseurs. Des facteurs comme la découverte de nouvelles ressources, l’amélioration du leadership politique, les réformes politique et une classe moyenne croissante sont en train de changer les dynamiques socio-économiques et pousser à des changements concertés du paysage des affaires sur le continent. La sous-région fait certainement face à des défis liés au développement des sources de croissance et de valeur ajoutée pour le pays et on parle ici de PME et surtout PMI. Ce sont ces petites industries qui vont générer l’emploi. Les défis sont aussi ceux de la sécurité alimentaire et du développement des zones rurales agricoles. Former des ressources humaines, développer l’industrie et les infrastructures rurales et s’assurer que les communautés, la population, les jeunes sont au cœur de ce développement, est à mon avis essentiel. C’est eux aussi qui, avec une approche Croissance Verte, conserveront les richesses de leur environnement. Je crois fermement que l’intégration régionale bâtira le futur de la sous- région. Ces pays devront s’appuyer sur les avantages comparatifs individuels : l’énergie communautaire portée par l’OMVG, les corridors entre les pays, la navigation fluviale comme celle sur le fleuve Sénégal portée par l’OMVS, le commerce sont autant de secteurs d’intégration qui conditionnent une croissance forte.
Le Bureau régional de la BAD au Sénégal (SNFO) couvre le Cap Vert, la Gambie, la Guinée Bissau, la Mauritanie et le Sénégal. Globalement, ces cinq pays représentent une situation économique et sociale différente.
Peut-on avoir une situation, pays par pays ?
Des pays comme le Cap Vert, le Sénégal et la Mauritanie ont enregistré des avancées certaines au plan économique, mais des efforts restent à faire en vue notamment de réaliser un taux de croissance élevé sur un horizon temporel long. Le Cap Vert est en transition vers la catégorie des Pays à Revenu Intermédiaire. Un cas de succès et les étapes pour réaliser cette transition sont étudiés par la BAD et le gouvernement. L’étude sera bientôt publiée (Cape Verde : the Road Ahead). Il a réalisé une croissance de 5,6% en 2011, avec un investissement intérieur brut annuel moyen d’environ 47% du PIB au cours de ces trois années, dont 29% pour l’investissement privé. La Gambie, quant à elle, a enregistré des avancées certaines en matière de réformes économiques et financières, avec une croissance du PIB en termes réels supérieur à 5% entre 2009 et 2011. L’investissement intérieur brut a représenté, en moyenne annuelle, 18% du PIB entre 2009 et 2011, dont 12% pour l’investissement privé. Une concentration des actions paraît nécessaire pour relever l’investissement.
Le Sénégal a réalisé une croissance du PIB en termes réels de 2,1% en 2009 et 4,2% en 2010. En 2011, la croissance a été modeste puisque le taux serait retombé à 2,6%. L’inflation, mesurée par l’indice des prix à la consommation, a été respectivement de 1,2% en 2010 et 2,1% en 2011. Le taux d’investissement intérieur brut annuel a tourné autour de 23% du PIB entre 2009 et 2011, dont 16% environ pour l’investissement privé annuel.
Un bref résumé du portefeuille de projets/programmes de la BAD au Sénégal?
Depuis 1972, le Groupe de la BAD a accordé 74 prêts d’une valeur totale, net d’annulations de 825 milliards (Mds) Fcfa. En cours, la BAD a 7 opérations nationales (volume total net d’engagements de 115 Mds Fcfa). Plus des 2/3 dans l’agriculture, l’eau et l’assainissement, l’appui aux réformes économiques et les secteurs sociaux. Le tiers restant dans le secteur des infrastructures : dont 18% électrification rurale. A travers son Guichet privé, la BAD engage actuellement près de 103 Mds Fcfa dans les infrastructures telles que l’Aéroport Blaise Diagne et l’Autoroute à péage. La BAD est aussi engagée à développer l’intégration régionale avec 9 projets multinationaux concernant le Sénégal. Près de 109 Mds Fcfa sont dédiés essentiellement au financement des corridors routiers régionaux. Ces projets impliquent plusieurs institutions, organisations et structures multinationales en particulier l’Omvg, l’Omvs, la Cedeao et l’Uemoa. Ils visent notamment à accroître l’intégration régionale et le développement des infrastructures et des équipements collectifs. Le total des engagements des Guichets public et privé s’établit à près de 218 Mds Fcfa. Nous avons quelques projets-phares dans l’Agriculture, l’Eau, l’Assainissement, l’Electrification rurale, la Santé, l’Education… Il y a le PAPIL ou Appui à la petite irrigation locale qui a grandement contribué à augmenter la production de riz notamment, la sécurité alimentaire, la lutte contre le changement climatique dans les régions de Fatick, Kolda, Tambacounda et Kédougou ; Ou aussi le PADERCA ou Projet d’appui au développement rural en Casamance, le PEPAM 2 pour l’Eau et l’Assainissement en milieu rural dans les régions de Kafrine, Sédhiou et Zinguinchor ; Ou encore l’Electrification rurale dans la région de Louga ; la Santé avec l’Hôpital de Matam, CSR Kanel et Ranérou ; l’Education avec 4 lycées et 210 salles de classe sur tout le territoire national.
Discussion à ce sujet post