Le Plan de Rénovation de l’Agriculture et de l’Élevage pourrait s’articuler autour des axes suivants :
1/ La maitrise de l’eau, premier impératif.
Contrairement à une idée répandue, le Sénégal regorge suffisamment d’eau de surface et dans son sous-sol.
Beaucoup de sénégalais seront certainement surpris d’apprendre que le plus réservoir d’eaux souterraines de notre pays se trouve dans le département de Linguère, pourtant réputé zone aride.
Les investissements dans ce domaine auront pour objectif, de mettre en œuvre un vaste programme d’irrigation sur l’ensemble du territoire national, de forages, de stockage des eaux de pluie et d’approvisionnement en eau potable des populations.
Le budget de l’armée pourrait être augmenté, pour lui permettre de participer à la mise en œuvre du programme de forages, dans le cadre de son concept « Armée- Nation. »
Notre armée dispose d’un matériel de forage perfectionné qui est sous utilisé.
Après la mise en œuvre du programme du premier quinquennat, il ne devrait plus exister au Sénégal de zones où les populations n’ont pas accès à l’eau potable.
Si ce pari n’est pas gagné jusqu’à présent, c’est parce que, pour l’essentiel, le Sénégal a recours aux partenaires au développement pour les investissements relatifs à l’approvisionnement en eau potable des populations.
La tendance devrait être inversée par des investissements tirés du budget national
2/La reconstitution du capital semencier.
C’est un domaine sur lequel on a beaucoup épilogué et, on a toujours l’impression de faire du surplace .En dépit des tentatives des différents gouvernements, on assiste de plus en plus à une dégénérescence de la qualité des semences d’arachide, pilier de l’agriculture sénégalaise.
Notre petite expérience dans le secteur de l’agriculture a fini de nous convaincre nous pensons que cette mission ne peut être directement accomplie par le ministère de l’agriculture.
Elle devrait être confiée à un service autonome, avec un cahier des charges et des moyens conséquents.
L’ANCAR (Agence Nationale de Conseil Agricole et Rural) renforcée, pourrait certainement être une solution. Elle dispose déjà d’une expérience réussie dans la reconstitution du capital semencier communautaire du maïs, de l’arachide et des céréales sèches.
3/L’approvisionnement en intrants pour les cultures et la fertilisation des sols.
Le premier acte pour une solution à ce problème, devrait être la nationalisation des ICS (Industries Chimiques du Sénégal) et des phosphates de Matam. Il est difficilement acceptable que le Sénégal, disposant de matières premières pour la fabrication de certains engrais, n’arrive point à approvisionner à temps, et en quantité les paysans pendant la saison des pluies.
Ces sociétés nationalisées devront faire l’objet d’un contrôle strict et périodique, pour qu’elles ne subissent les travers de certaines autres qui les ont précédées.
Pour notre pays, la souveraineté agricole devrait commencer par une souveraineté en intrants, pour augmenter substantiellement la production.
Parallèlement, un programme de compostage national devrait être mis en œuvre, pour développer l’agriculture biologique.
Une attention particulière sera apportée aux études environnementales, pour limiter les effets négatifs des engrais sur l’écosystème. Des programmes de défense et de restauration des sols et, des écosystèmes fragiles seront aussi mis en œuvre.
4/La dotation en matériel agricole.
Elle concerne deux volets ; le matériel moderne et le matériel attelé. Depuis la fin du « programme agricole », de l’époque du Président Senghor, dans les années 80, les gouvernements qui se sont succédé ont, soit peu investi pour l’acquisition de matériel agricole, soit consacré plus de moyens à l’achat de tracteurs et autres matériels modernes, au détriment du matériel attelé.
En attendant la formation en nombre suffisant des agriculteurs du futur, le matériel attelé doit être la priorité.
La méthode d’exploitation familiale à laquelle s’adonne la majorité des paysans sénégalais, ne requiert pas l’utilisation de tracteurs à grande échelle. Dans sa première phase, le plan devra équiper massivement les paysans en matériel attelé .La fabrication du matériel sera confiée à l’industrie locale et au secteur de l’artisanat. La productivité et les revenus du plus grand nombre de producteurs devraient ainsi augmenter.
5/L’encadrement des paysans.
Si l’Inde, pays que nous avons pris comme modèle, a réussi la révolution verte, c’est grâce, en partie, à la mise en œuvre d’une bonne politique d’encadrement de ses paysans.
C’est incompréhensible, que le Sénégal ait abandonné le système d’encadrement des paysans, dont la majorité est illettrée et analphabète.
Aucun pays au monde n’a réussi à développer son agriculture et son élevage sans encadrement durable des acteurs.
Pour ce faire, l’État devrait fusionner l’ANCAR et l’INADA (Agence Nationale d’Insertion et de Développement Agricole ex REVA.) Cette nouvelle structure devra établir une parfaite collaboration avec l’ISRA et les organisations de producteurs. Il s’agira, comme en Inde, d’encadrer le paysan, depuis l’acquisition des semences, jusqu’à la vente de son produit.
La gestion des semences aussi devrait être confiée à la nouvelle structure, qui mettra en place des instruments de stockage et de conservation.
L’ENCR (École Nationale des Cadres Ruraux) de Bambey devrait être rénovée, pour la formation d’encadreurs en nombre suffisant.
En tout état de cause, il faudrait éviter les fautes, errements et dérapages de l’ancienne Société de Développement et de Vulgarisation Agricole (SODEVA.)
La SAED (Société d’Aménagement des Terres du Delta) et la SODAGRI (Société de Développement Agricole et Industrielle) de l’Anambe devraient être dissoutes. En dépit de la compétence de leurs ingénieurs, force est de constater, qu’elles sont structurellement inadaptées. Depuis leur création jusqu’aujourd’hui, elles ont englouti beaucoup d’argent sans résultats probants.
Le ministère de l’agriculture pourrait confier la mission d’aménagement des terres à des sociétés privées, sur la base d’un appel d’offre ou d’un accord de partenariat.
En tous cas, il a été constaté que, les coûts d ‘aménagement à l’hectare de la CSS (Compagnie Sucrière Sénégalaise) sont beaucoup moins élevés que ceux de la SAED. Des gains importants pourraient ainsi être réalisés.
L’autre paradoxe, c’est que, pour les mêmes types d’aménagement, les coûts sont moindres au Mali et au Burkina Faso. Et pour autant, ce sont les mêmes entreprises qui réalisent les aménagements au Sénégal.
Dans ce domaine aussi, l’utilisation des ressources de notre armée nationale permettrait d’amoindrir les coûts et de gagner en efficacité.
Le service du Génie Rural, en collaboration avec les services décentralisés du ministère de l’agriculture, renforcés, DRDR (Directions Régionales du Développement Rural) et SDDR (Services Départementaux du Développement Rural), pourrait assurer le suivi des travaux d’aménagement.
L’apport de la SODEFITEX (Société de Développement et de Fibres Textiles) sera d’un intérêt certain, compte tenu de son expérience dans le domaine de la formation et de l’encadrement des paysans.
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