Qui est le professeur Sall ?
Je suis un professeur de finance. J’enseigne encore la finance d’entreprise et de marchés à l’UCAD de Dakar depuis une vingtaine d’années. J’ai eu à gérer des structures au niveau de la Faculté des sciences économiques et de gestion. Plus précisément à l’Institut de formation en Administration des entreprises (IFACE) où j’ai été Directeur des études puis Directeur de l’Institut pendant une dizaine d’années. Ensuite, j’ai été Directeur du Centre de Recherche en Gestion des entreprises (CRGE) que je viens de quitter après ma nomination au Fonds de Garantie Automobile. Au niveau du CRGE, nous avons bouclé, en mi-mai, une activité scientifique de haute facture. Nous avions créé, il y a un an, la Société Africaine de Management qui regroupe des enseignants et chercheurs en gestion et management des entreprises d’Afrique, du Maghreb, d’Europe et des Amériques.
Il faut dire que le Fonds de Garantie Automobile (FGA) est une structure contrôlée à 60% par l’Etat ; le reste du capital est réparti entre les compagnies d’assurances et de la Caisse de Sécurité et Sociale. Le FGA est une structure auxiliaire aux compagnies d’assurance et notre mission est de prendre en charge, indemniser et soigner les victimes non prises en charge par les assurances. Comme vous le savez, la mission d’une compagnie d’assurance, c’est d’indemniser, de prendre soin des victimes d’accidents de voitures, de catastrophes couvertes par l’assurance. Et le FGA est là pour couvrir les victimes qui ne sont pas couvertes par une assurance automobile. Beaucoup de gens, à propos du Fonds de Garantie Automobile, pensent que nous vendons ou louons des voitures. Ce qui n’est pas le cas…
Notre philosophie, c’est de considérer qu’un Sénégalais, qu’il soit assuré ou pas, doit être pris en charge médicalement. Il est inhumain qu’une voiture heurte quelqu’un, qu’on l’évacue à l’hôpital et qu’on refuse de le prendre sous prétexte qu’il n’est pas couvert par une assurance. Donc, à chaque fois qu’une personne est heurtée par un véhicule qui n’est pas assuré ou qu’il prend la fuite, le FGA intervient pour prendre soin de la personne, la soigner et payer ses ordonnances. Lorsque la personne est rétablie, elle est indemnisée comme si elle était bien assurée. Il y a un barème en fonction de la gravité de l’accident. Evidemment, notre mission est éminemment sociale. C’est de venir en aide et de soigner des personnes qui n’ont pas les moyens. C’est ce qui fait que nous sommes déployés dans certains hôpitaux, comme à l’hôpital Principal, à Le Dantec et à l’hôpital de Grand Yoff (ex-CTO). Dans ces hôpitaux, il y a un de nos agents sur place, qui déclenche la procédure administrative de prise en charge, aussitôt qu’il y a un accidenté.
Après ce rapide diagnostic, que comptez-vous faire pour redynamiser le Fonds ?
Je vous disais que notre mission, c’est de couvrir les personnes non assurées et nous déployer sur l’étendue du territoire national. Dès ma prise de service et après avoir pris connaissance de la mission hautement humanitaire du Fonds, nous n’avons pas manqué de souligner la modestie des moyens alloués. Nos ressources disponibles sont essentiellement consacrées à la prise en charge et à l’indemnisation des victimes. Elles proviennent d’une subvention de l’Etat, d’une contribution des compagnies d’assurance sur la prime de Responsabilité Civile obligatoire, payée par toute voiture assurée. Nous prenons 2,5% de cette prime d’assurance. Ce qui n’est pas énorme… Car cette contribution des assurés se monte annuellement à 300 millions Fcfa. Heureusement, mon prédécesseur m’a laissé cet immeuble qu’il a construit et qui nous rapporte des revenus locatifs.
Bref, la couverture que j’ai trouvée n’est pas aussi satisfaisante parce que nous sommes seulement présents au niveau de trois hôpitaux alors que notre mission, c’est couvrir l’ensemble du territoire national. Nous avons des conventions avec certains hôpitaux à l’intérieur du pays, même si nous n’y avons pas une présence physique et effective. Il y a, comme on le sait, des axes au Sénégal à fréquences d’accidents élevés, comme la route de Touba, de Saint Louis… Il est souhaitable qu’on soit présent au niveau de ces axes et c’est un des volets de nos activités. Notre ambition, c’est d’étendre la couverture à tout le territoire national et de travailler en synergie avec les hôpitaux et structures sanitaires tels que SUMA, la Croix Rouge et autres structures qui peuvent nous aider à mieux soulager les personnes. Une chose est de prendre en charge les victimes, mais une autre est d’anticiper et de permettre d’éviter ces accidents, avoir une action préventive à l’occasion des Gamou, Magal et récemment lors du Pèlerinage marial de Popenguine, avec la Nouvelle Prévention Routière.
Comment vous voyez le FGA dans les prochaines années ?
D’ici les prochaines années, c’est simplement aller au-delà de ce que nous faisons. Trouver un second souffle pour rebondir, comme tout athlète qui est à la recherche de performance. J’ai trouvé que mon prédécesseur a du mérite, il a construit un immeuble R+5 qui nous rapporte des revenus locatifs. Maintenant, il faudra développer des activités avec tous nos partenaires qui travaillent autour de l’Automobile qui ne sont pas seulement les assureurs. Ce sont les garagistes, les mécaniciens… qui peuvent contribuer à réduire plus ou moins les accidents. Nous avons besoin de plus de ressources puisque notre activité ne génère pas de ressources. Déjà, que le budget dont nous disposons est largement insuffisant pour soigner les victimes et les indemniser. Il est temps de sensibiliser l’ensemble des partenaires qui gravitent autour de l’Automobile. Qu’ils s’agissent des concessionnaires, des pétroliers et autres afin d’anticiper sur les risques d’accidents.
Pour nos ambitions, nous avons essentiellement deux axes de travail ; c’est améliorer certaines d’activités qui tournent autour de l’Automobile et mettre en place des systèmes de réparation, avoir au niveau de l’ensemble du territoire des points de secours et de prise en charge au niveau des hôpitaux. Dans un premier temps, au moins, dans chaque région, chaque grand hôpital, chaque centre de soins stratégique, c’est d’y avoir un représentant qui puisse relayer notre travail et nous aider à secourir le plus rapidement possible et cela demande des moyens. L’autre aspect concerne la réduction des accidents. Pour cela, il faut voir dans quelle mesure avoir un système de transport moderne. Il serait bon que tous les partenaires réfléchissent pour qu’on ait des sociétés de transport modernes et mieux organisés afin de réduire les accidents. Mais avec la Nouvelle Prévention Routière, nous organisons des séances de sensibilisation sur des thèmes comme la somnolence et la vitesse. En fait, les accidents, c’est la conjugaison de nombre de facteurs comme la personne, la voiture et l’état de la route. Nous connaissons l‘état de nos routes et nous faisons tout pour les réfectionner. Aussi, la plupart des véhicules de transport sont très âgés et même parfois ont dépassé la limite d’âge. L’intérêt de cette action concertée, c’est par rapport aux concessionnaires automobiles et autres professionnels du transport afin de travailler ensemble, de mettre des outils performants et adaptés à la disposition des transporteurs. Ce que nous préoccupe, c’est toute action qui vise à réduire davantage les accidents, les blessés et les morts.
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