Quels sont les obstacles au développement du leadership féminin au Sénégal ? Comment y remédier ?
Le leadership ne se définie pas par le genre, mais plutôt par une compétence personnelle et une capacité d’influence, qui marquent la différence et permettent d’être écouté et suivi.
Cependant, au Sénégal force est de considérer que pour qu’une femme puisse asseoir son leadership, elle est contrainte de faire preuve de qualités « extraordinaires » pour mériter la reconnaissance. L’évocation d’un « leadership féminin » devient presque rédhibitoire du fait de l’inexistence de la notion de « leadership masculin ». Tout de même, on peut opter délibérément d’y voir une certaine opportunité de galvaniser les femmes et de les encourager à rayonner et à prendre, en quelque sorte, une revanche sur l’histoire.
La femme fait face à de réels obstacles au développement de son leadership souvent liés à des facteurs naturels comme la maternité et la manifestation des effets de la ménopause, mais également à des facteurs externes comme le sexisme et les inégalités. Au niveau du top management, les « clubs de garçons » sont encore légion.
Pour y remédier, il faut rester soi-même et oser s’affirmer, par tout ce que l’on est et à travers tout ce que l’on est capable de faire. Une femme, pour réussir, doit juste rester authentique et travailleuse.
Nous sommes passés d’une époque où les femmes étaient totalement absentes des instances de décision à une phase transitoire vers un avenir que j’entrevoie forcément meilleur. En attendant, il nous faudra nécessairement travailler plus et mieux. S’il le faut, deux fois voire trois fois plus que les hommes. Les femmes sont plus confortables dans la promotion par le mérite. Le changement de mentalité doit simplement montrer qu’en donnant les mêmes chances aux femmes, avec les mêmes atouts, elles sont très compétitives. L’enjeu fondamental étant la performance de nos organisations, il s’agira alors d’intégrer naturellement le potentiel porté par les femmes, pour être meilleurs.
Pour faire bouger les lignes, il faut également que mes sœurs évitent d’expliquer les obstacles qui se dressent devant elles, uniquement par le fait qu’elles soient des femmes. Et même si c’était le cas, il ne faudrait pas que cela soit un frein à leur détermination. Il ne faut jamais se laisser décourager.
On parle souvent de plafond de verre en milieu professionnel pour les femmes, est-ce une réalité que vous avez constatée ? L’avez-vous vécu ?
Si on s’en réfère aux statistiques, on ne peut pas nier que, dans les faits, de nombreux efforts sont encore à faire. Aujourd’hui, au Sénégal, combien de sociétés nationales sont-elles dirigées par les femmes ? Combien de grandes entreprises privées comptent-elles plus de 30% de femmes dans leurs directoires ?
Mais le changement ne se produira pas ex nihilo. Il y a des étapes à franchir et des actions à mener. Sinon le plafond de verre s’imposera de lui-même. Et c’est là que commence l’établissement de la politique d’équité. Les femmes ont besoins d’être préparées et dotées des mêmes atouts que les hommes, faute de quoi, à l’heure du bilan, elles risquent d’être pénalisées. Pour y parvenir, cela demande une politique volontariste dans la stratégie de gestion des ressources humaines.
Personnellement, je n’ai pas vécu le phénomène du plafond de verre, et je peux dire que dans le Groupe Sedima, ce risque est nul. Nous croyons en la femme, en ses capacités, son intelligence, ses compétences et son potentiel.
Le respect et la promotion de la condition des femmes sont un combat de tous les jours. Avez-vous pensé à encadrer et accompagner en tant que mentor pour continuer le combat pour l’égalité des genres ?
Au quotidien, je suis en contact permanent avec des femmes qui mettent en œuvre des actions allant dans le sens du développement socio-économique. J’apprends beaucoup d’elles, de la même façon que je partage mon expérience avec elles. L’objectif est d’aller le plus loin possible dans l’autonomisation et la réalisation de soi.
Il faut amener les femmes à avoir plus confiance en elles-mêmes. C’est une conviction qu’il faut accréditer dans leurs mentalités dès le bas âge. C’est une orientation sociétale à conforter en tenant compte de nos réalités socioculturelles qui ont toujours donné à la femme une place de premier plan. C’est un combat que tout le monde doit porter, quelle que soit notre identité de genre.
Nous portons activement ce plaidoyer à travers nos interventions auprès des jeunes, dans les écoles, dans les associations de femmes, dans les prisons, mais également et surtout auprès de nos collaboratrices. C’est dans ce sens que s’inscrit la démarche de faire du premier restaurant KFC Sénégal, un restaurant 100% féminin. Au-delà de l’hommage rendu à la bravoure de la femme africaine, c’est un signal fort que nous voulons véhiculer pour donner aux femmes de réelles opportunités de réussite.
Nous portons également ce plaidoyer par l’exemple, en montrant aux sénégalaises, aux africaines et au reste du monde jusqu’où une femme peut y arriver à force de travail et de persévérance.
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