L’économie sénégalaise est confrontée ces deux dernières années à plusieurs défis qui ont eu pour effet de ralentir sa croissance. La bonne nouvelle est que les perspectives sont nettement meilleures, surtout avec les premiers effets du démarrage des activités gazières et pétrolières. Ce qui laisse augurer une bonne exécution de la gestion budgétaire dans un environnement interne relativement favorable. Un optimisme affiché par Mamadou Moustapha Bâ, ministre des Finances et du Budget qui se prononce dans une interview exclusive avec REUSSIR sur les contours et ambitions de la loi de finances 2023. Sans équivoque, il affirme que le budget 2023 du Sénégal s’inscrit dans la même trame que ceux qui l’ont précédé depuis 2012.
Réussir Business : Monsieur le Ministre, l’Assemblée Nationale vient d’adopter le projet de Budget 2023. Pouvez-vous revenir sur ses grandes lignes et ses points de rupture par rapport au précédent ?
Mamadou Moustapha Ba : Il est nécessaire de rappeler que la loi de finances de l’année 2023 a été élaborée dans un contexte difficile marqué par une instabilité de l’environnement économique international avec pas moins de six crises, d’intensité différente
certes mais qui, toutes, font payer un prix élevé à nos finances publiques. Il s’agit de crises aux plans sanitaire (avec la Covid-19), climatique (avec l’aggravation du phénomène des inondations), énergétique (avec notamment une instabilité des prix du pétrole), monétaire
(avec le retour de l’inflation), alimentaire (avec les conséquences de la guerre en Ukraine sur les cours mondiaux des céréales) et sécuritaire (avec l’explosion de la violence terroriste chez certains de nos proches voisins). Toutefois, pour le Sénégal, les perspectives d’une reprise progressive de la croissance économique sont bonnes. Au plan budgétaire, la mobilisation des
ressources pour l’année 2023 devrait bénéficier des retombées de la mise en œuvre de la Stratégie des Recettes à moyen terme (SRMT), dans un contexte de consolidation de la bonne tenue de l’activité économique. Ces actions devraient conforter efficacement la progression des recettes fiscales. Également, les premiers effets du démarrage des activités gazières et
pétrolières laissent présager que la gestion budgétaire pourrait s’exécuter dans un environnement interne relativement favorable. En ce qui concerne les dépenses, on peut retenir notamment la poursuite de la réduction du train de vie de l’Etat et la rationalisation de son mode de fonctionnement ainsi que le soutien au pouvoir d’achat des ménages à travers
un meilleur ciblage des subventions à l’énergie, aux denrées de première nécessité et à l’agriculture. C’est un budget qui épouse parfaitement les huit secteurs clés de notre politique
économique que sont : les infrastructures et les services de transport ; les infrastructures et les services énergétiques ; l’agriculture ; l’éducation et la formation ; la santé et protection
sociale ; l’hydraulique et assainissement ; la gouvernance territoriale ; la défense et la sécurité.
Enfin, c’est une loi de finances qui s’inscrit dans la même trame que celles qui l’ont précédée depuis 2012, c’est-à-dire un budget de solutions concrètes aux problèmes du pays. C’est ainsi que la priorité sera accordée à la poursuite des investissements dans le secteur de la santé (infrastructures et relèvement des plateaux techniques), le renforcement du secteur agricole, la
préservation des marqueurs sociaux (bourses familiales, couverture maladie universelle , PROMOVILLE et Programme d’Urgence pour la Modernisation des Axes frontaliers), le soutien aux ménages, le renforcement des projets d’infrastructures, l’extension de l’exploitation du Train Express régional jusqu’à l’aéroport internationale Blaise Diagne (AIBD) ainsi que le renforcement de la sécurité de tous les citoyens.
Le budget 2023 est présenté comme le premier de l’État du Sénégal à avoir franchi la barre des 6000 milliards de francs CFA, exactement un montant de 6411,5 milliards de FCFA. Comment peut-on expliquer cette performance inédite ?
Cette performance inédite s’explique d’abord par un effort interne de nos administrations de recettes, comme indiqué plus haut, avec une meilleure adaptation du système fiscal et douanier aux évolutions du contexte économique, social, environnemental et numérique, une amélioration de la productivité du travail et une réduction des coûts supportés par les contribuables pour se conformer à leurs obligations vis-à-vis des administrations en charge de la mobilisation des recettes Ensuite, l’on peut dire que ces 6 411,5 milliards FCFA proviennent fondamentalement de la croissance, c’est-à-dire de l’augmentation de la richesse nationale sur une année. Et quand il y a croissance, cela veut dire que les entreprises et les ménages gagnent plus d’argent, et paient plus d’impôts et taxes. Il y’ a également la qualité de la signature de notre Etat qui nous permet de lever des fonds sur les marchés intérieurs et extérieurs pour assurer la couverture de nos besoins de financement. C’est la preuve que le Sénégal avance, que nous sommes sur la bonne voie, malgré les difficultés, malgré les crises, et en dépit des vents contraires.
L’exploitation prochaine des ressources du pétrole et du gaz se précise de plus en plus. Que faut-il en retenir en termes d’effets induits pour l’économie du pays ?
Concernant l’exploitation du pétrole et du gaz, les premières ressources sont prévues en fin 2023. Le consensus d’un modèle de gestion vertueuse et optimale de la manne financière issue de ces ressources est encadré par la loi n° 2022-09 du 19 avril 2022 relative à la répartition et à l’encadrement de la gestion des recettes issues de l’exploitation des hydrocarbures.
En effet, cette loi prévoit la budgétisation intégrale, dans les lois de finances, des recettes tirées de l’exploitation des hydrocarbures ; la transparence dans la gestion des ressources d’hydrocarbures par la création de deux Fonds : un Fonds intergénérationnel destiné à tenir
disponible, pour les générations futures, une épargne constituée et rentabilisée à travers des placements et un Fonds de stabilisation ; l’interdiction de toute cession anticipée des ressources d’hydrocarbure (il est exclu toute hypothèque sur ces ressources) ; la reddition sur tous les actes posés dans la gestion de ces recettes.
Concernant la répartition des ressources, la loi prévoit un maximum de 90% des recettes prévues chaque année pour abonder le budget général, permettant de financer principalement des projets et programmes prioritaires d’investissement public. De la même manière, un minimum de 10% est prévu pour abonder le Fonds intergénérationnel.
Pour finir, le surplus de recettes constaté à la fin de chaque trimestre, résultant de la différence entre les recettes projetées et les recettes effectivement encaissées, va constituer le Fonds de Stabilisation.
Parallèlement, le Sénégal est en train d’élaborer un schéma directeur du pétrole et du gaz afin d’identifier les applications qui développeront l’économie locale et qui apporteront de la valeur ajoutée en termes de création d’emplois et de développement de nouvelles industries ;
l’objectif étant la création d’une chaine de valeur du pétrole et du gaz. Chaque option sélectionnée fera l’objet d’une stratégie de financement et d’implémentation.
Le projet de loi de Finances 2023 est bâti sur une prévision de croissance de 10,1%, là où le Fonds monétaire international table sur une croissance exceptionnelle de 8,1%. Comment
expliquez-vous la variation de ces deux prévisions ?
Les experts des différents ministères ont fait un travail remarquable basé sur des hypothèses relatives à la situation réelle de notre économie et des informations relatives aux projections de production du pétrole et du gaz. La différence notée s’explique, tout simplement, par le fait que le FMI n’intègre pas dans ses hypothèses la production du gaz à partir de 2023.
Par ailleurs, le FMI a revu ses prévisions à la hausse avec un taux de 8,7% pour se rapprocher de notre taux, alors que les nôtres ont été maintenues depuis leur publication. Il faut donc retenir que la projection du taux de croissance n’est pas une science exacte ; il y a de la place
pour des divergences d’approches.
Le président de la République, Monsieur Macky SALL accorde une attention particulière à la
problématique de l’emploi. D’où le lancement du programme « Xëyu ndaw ñi ». Quelle place la jeunesse et l’emploi vont occuper dans le budget 2023 ?
Le Président Macky SALL tient beaucoup au bien-être de la population sénégalaise. C’est pourquoi, dès son accession au pouvoir, il a mis en place une politique visant à promouvoir
l’emploi, notamment au profit des jeunes.
Comme vous l’avez dit, en 2021, un vaste programme de lutte contre le chômage dénommé « Xëyu ndaw ñi » est lancé et couvre toutes les régions du Sénégal. Il fait partie des priorités dans le budget de 2023. Il importe de rappeler que ce programme est prévu sur 3 ans pour un coût de 450 milliards de FCFA avec sept composantes.
D’abord le recrutement spécial de plus de 34 000 agents dont des enseignants, des stadiers, des volontaires du nettoiement, des volontaires de la santé, de animateurs socioéducatifs etc.
Ensuite, les projets d’intérêt communautaire comme le pavage, PROMOVILLE, AGETIP, l’entretien courant des routes non classées avec le FERA.
Il est prévu la création d’emplois avec le secteur privé à travers la Convention État-employeur. Il y a aussi des projets d’investissements publics à haute intensité de main d’œuvre (comme avec l’ANIDA, avec plus de 25 000 bénéficiaires) ;
Les autres volets sont relatifs à l’apprentissage et à la formation ; le financement de l’entreprenant et l’autonomisation pilotée essentiellement par la DER/FJ et le PROMISE ; la
subvention aux tenues scolaires. Comme vous pouvez le constater, ces composantes du programme ciblent spécifiquement et exclusivement la jeunesse.
Que peut-on attendre du budget 2023 en termes de politique sociale, surtout en cette période où le pouvoir d’achat des Sénégalais est fortement rogné. Quelles sont les mesures prises pour contenir la flambée des prix ?
Le Gouvernement a fait le choix d’agir, en même temps, sur la maîtrise, voire la baisse des prix et sur l’amélioration des revenus, afin de préserver au maximum le pouvoir d’achat des citoyens.
Le budget 2023 prévoit 35 milliards de francs CFA de cash transfert dans le cadre du programme des bourses de sécurité familiale, 450 milliards de francs CFA pour la subvention à l’énergie, 100 milliards de francs CFA pour contenir les prix des denrées de première nécessité, le renforcement des mesures de soutien à la filière rizicole par l’octroi d’une subvention de 32 FCFA par kilogramme dont 30 FCFA au profit des producteurs et 2 FCFA au profit des transformateurs.
D’un autre côté, nous agissons sur la consolidation des mesures de revalorisation des salaires de l’ensemble des agents de l’Etat avec une hausse de 236 milliards de FCFA puisqu’elles s’établissent à 1 273 milliards FCFA.
La gestion de la dette publique du pays suscite toujours de vifs débats. Que répondez-vous à
ceux qui vous reprochent de faire recours à l’endettement pour financer les grands projets de
l’État ?
Dans son dernier rapport sur l’analyse de viabilité et de la trajectoire de la dette publique du Sénégal, publié en juin 2022, le FMI a écrit que « la dette du Sénégal est jugée viable avec un risque modéré de surendettement ».
C’est dire donc que la stratégie de gestion de la dette est réalisée au regard du risque de surendettement, qui est passé de faible à modéré depuis près de 3 ans à travers le recours aux financements non-concessionnels qui est de moins en moins fréquent, visant dorénavant uniquement à financer des projets présentant des taux de rendement interne élevés. Nous travaillons aussi sur une réorientation de plus en plus importante du financement de marché vers le marché régional domestique des titres publics
Par ailleurs, la mise en œuvre de la SRMT (stratégie pour la mobilisation des recettes à moyen terme), dont je vous parlais au début de cette interview, contribuera grandement à l’atteinte de l’objectif de la souveraineté budgétaire que nous poursuivons et aura pour effet une réduction du recours à l’endettement. En plus du renforcement de la mobilisation des ressources propres de l’Etat, avec la mise en œuvre du PAP2A, le Sénégal recherche un développement endogène, orienté vers un appareil productif propice et plus compétitif avec l’implication d’un secteur privé national fort. Ainsi, il est projeté une augmentation de la contribution du secteur privé dans le financement de l’investissement.
Quelle analyse faites-vous de la viabilité et de la soutenabilité de la dette extérieure ?
La dette financière publique est contractée sous forme d’engagements financiers remboursables, suivant des termes et des conditions convenus d’accord parties, au moyen de conventions de financement avec des partenaires techniques et financiers publics ou des investisseurs privés, de levées de fonds sur les marchés de capitaux domestiques ou internationaux et de titrisation de créances par l’Etat. Le recours à l’endettement se justifie par la recherche de la couverture des besoins de financement liés au déficit budgétaire et à l’amortissement de la dette publique. Il est à noter que la couverture du déficit porte sur le financement de projets et programmes d’investissement se rapportant à la trajectoire soutenue de croissance notée ces dernières années.
De 2012 à 2022, l’encours de la dette affiche une croissance annuelle moyenne de 14,1 % là où le ratio d’endettement passe de 39,9% à 68 %.
Concernant la soutenabilité de la dette, il est à préciser que le Sénégal garde un risque de surendettement modéré
La soutenabilité de la dette sera consolidée en faveur de la mise en œuvre de la SRMT qui vise un taux de pression fiscale de 20%, mais également, par la politique de maitrise du déficit.
Également, la politique d’endettement privilégiera les ressources concessionnelles. Le gouvernement vient de révéler un accroissement exceptionnel de la masse salariale de la
Fonction publique qui s’établira à 1 273 milliards FCFA en 2023.
Comment comptez-vous la réguler et la contenir à l’avenir dans une fourchette soutenable pour favoriser le financement de notre développement par nos ressources propres ?
Lors du Conseil des ministres du 04 mai 2022, le chef de l’État a réitéré son attachement à l’amélioration du pouvoir d’achat des agents publics, avec l’entrée en vigueur, à partir du 1er mai 2022, des revalorisations salariales exceptionnelles dans la Fonction publique, ce qui a constitué un effort budgétaire spécial d’environ 120 milliards FCFA. Avant de procéder aux
revalorisations salariales, des simulations ont été faites sur leur soutenabilité.
Aujourd’hui, l’impact de la revalorisation pour 2022 est bien pris en charge, ce qui a fait passer les dépenses de personnel de 952 milliards de FCFA à 1 037 milliards de FCFA.
Au titre de l’année 2023, les dépenses de personnel sont budgétisées de 1 273 milliards de FCFA, pour une correcte prise en charge des revalorisations salariales à l’échelle de l’ensemble des agents publics concernés.
Le Sénégal produit annuellement dans le cadre de ses statistiques consolidées transmises à la communauté des investisseurs, la masse salariale agrégée de toutes les entités publiques. En
pourcentage des recettes fiscales consolidées, elle a représenté 42% en 2021 contre 43% en 2020. Au sein de la commission de l’UEMOA, l’harmonisation du contenu et du champ n’est pas encore achevée pour permettre une comparaison parfaite entre les États. C’est pourquoi le Sénégal présente le ratio masse salariale sur recettes fiscales pour l’administration centrale. Le gouvernement sénégalais a mis en œuvre un vaste programme infrastructurel. Le financement de ces grands projets d’infrastructures ne constitue-t-il pas une sérieuse équation pour les finances publiques ?
Le Sénégal dispose d’un stock d’engagements de financements de la part de ses partenaires pour couvrir les besoins de financement exprimés dans le PAP 2A.
La programmation des investissements prend en compte les projets et programmes dont le financement est acquis ou en négociation. Les ressources extérieures devraient en assurer les 63,4%, en majorité grâce à des prêts à des conditions concessionnelles, auxquels il faut rajouter les ressources internes à hauteur de 36,6%.
Il faut aussi préciser que dans le cadre du PAP2A, l’option affirmée est de s’appuyer sur le secteur privé, à travers des partenariats publics privé (PPP), afin de maintenir les ambitions en matière d’investissement sans creuser l’endettement et de consacrer davantage de ressources budgétaires à la prise en charge des aspects sociaux et autres urgences.
Par ailleurs, comme rappelé précédemment, la loi n° 2022-09 du 19 avril 2022 relative à la répartition et à l’encadrement de la gestion des recettes issues de l’exploitation des hydrocarbures, prévoit l’inscription de 90% des recettes dans le budget général. L’article 14 de cette même loi dispose que les recettes des d’hydrocarbures financent principalement des dépenses inscrites dans le PIP, le programme d’investissements prioritaires.
L’accès au financement reste encore une complainte pour le secteur privé national, notamment les TPE/PME. D’où l’idée émise récemment de mutualiser les agences de financement existantes.
Où en êtes-vous avec ce projet de rationalisation du dispositif financier de l’État ?
Tout d’abord, il faut reconnaitre qu’en matière d’accès au financement du secteur privé national, en particulier des PME/PMI, beaucoup d’efforts ont été consentis par l’Etat, à travers notamment le lancement des activités de la Banque Nationale de Développement
Economique (BNDE), un établissement bancaire à participation publique majoritaire qui a pour principale vocation le financement des PME/PMI. Au passage, les dernières données
communiquées par la banque font état d’une segmentation de son portefeuille de crédit à hauteur de 43% au profit des PME/PMI, en dépit de l’impact de la pandémie sur l’économie. Ces statistiques constituent un motif de satisfaction au même titre que les actions permanentes
de la DER/FJ, de l’ADEPME et du FONGIP, en matière d’inclusion financière au profit de ces structures.
Il est vrai que des attentes demeurent en matière de financement des PME/PMI, mais ce serait réducteur que de limiter le projet de rationalisation au seul objectif de financement des PME/PMI.
Comme l’a indiqué Monsieur le Premier Ministre Amadou Ba, lors de son discours de politique générale le 12 décembre 2022, le gouvernement s’engage à matérialiser un vœu cher au Président de la République, qui est de doter le Sénégal d’une grande holding bancaire, à l’effet notamment de renforcer le positionnement d’intérêts Il est vrai que des attentes demeurent en matière de financement des PME/PMI, mais ce serait réducteur que de limiter le projet de rationalisation au seul objectif de financement des PME/PMI. Comme l’a indiqué Monsieur le Premier Ministre Amadou Ba, lors de son discours de politique générale le 12 décembre 2022, le gouvernement s’engage à matérialiser un vœu cher au Président de la République, qui est de doter le Sénégal d’une grande holding bancaire, à l’effet notamment de
renforcer le positionnement d’intérêts sénégalais dans un secteur à fort rendement.
Par ailleurs, dans la perspective du financement du programme des 100.000 logements sociaux, nécessitant une forte inclusion financière de la population cible, l’État du Sénégal dispose d’une occasion historique de contribuer encore davantage au financement de son économie, tout en consolidant sa position sur la place financière UEMOA.
En outre, au regard de la nécessité de maillage territorial des services bancaires, indispensable à une forte inclusion financière, en particulier des couches défavorables visées par les filets sociaux (bourses familiales, aides sociales etc…), la mise en place d’une holding bancaire à capitaux sénégalais serait en mesure de promouvoir l’atteinte de ces objectifs.
Enfin, l’instauration d’une telle holding, à l’effet de centraliser les participations de l’Etat dans l’industrie bancaire, serait de nature à renforcer la synergie de groupe entre les banques concernées, synergie favorable à la consolidation et à la préservation de leurs activités, permettant ainsi de positionner les intérêts sénégalais dans un secteur à fort rendement.
Relativement au second volet de votre question qui a trait à l’étape actuelle du projet, il faut indiquer que les services ont fini de produire une note d’orientation et que les dispositions seront prises en vue du lancement du projet, dès validation du schéma définitif.
La pandémie de la Covid19 et la crise russo-ukrainienne ont davantage montré la vulnérabilité du pays en matière de souveraineté alimentaire. Pensez-vous que le pays est sur la bonne voie pour réaliser cette ambition ? Quelles sont les initiatives prises dans ce sens, notamment en matière agricole et industrielle ?
Une réunion ministérielle portant sur la Stratégie nationale de souveraineté alimentaire s’est tenue le 6 janvier 2023, sous la présidence du Premier Ministre. La pandémie de la Covid-19 et la crise Russo-Ukrainienne ont suscité des réflexes grégaires et mis en évidence les faiblesses structurelles de nombreux pays en développement en termes de production alimentaire et de protection sociale des petits producteurs. L’incidence de ces deux phénomènes a créé une situation de sous-production agricole au niveau mondial d’une part, et, favorisé la priorisation de la satisfaction de la demande intérieure en produits alimentaires des principaux pays exportateurs, d’autre part, engendrant ainsi un déficit sans précédent pour les pays importateurs de denrées alimentaires de base, comme en attestent les études réalisées par la FAO.
Face à cette situation, la souveraineté alimentaire est, dès lors, érigée en priorité du PAP2A. C’est ainsi qu’un Programme agricole de Souveraineté alimentaire et durable (PASAD) a été initié avec comme objectifs d’augmenter la production et la productivité agricole et de diversifier les spéculations et systèmes de production agricole, afin de consommer ce que nous produisons.
Pour atteindre ces objectifs indiqués, la stratégie reposera sur l’extension des surfaces cultivées et l’amplification des productions agricoles et horticoles au regard du volume de nos importations et des modes de consommation ; le renforcement des services agricoles et l’amélioration de la gouvernance du secteur agricole
Pour l’opérationnalisation de la stratégie, les interventions prioritaires porteront notamment, sur le développement des aménagements hydroagricoles dans les zones à fort potentiel ; l’accélération de la relance de l’horticulture ; le renforcement des chaînes de valeur à travers la promotion des exploitations familiales résilientes et une production sensible à la nutrition ; sans oublier la promotion de l’entreprenariat des jeunes et des femmes dans l’agriculture et l’agrobusiness.
Au titre de 2023, les ressources programmées pour atteindre ces objectifs portent sur 187,6 milliards de FCFA pour prendre en charge la campagne agricole 2022-2023 ; des projets et programmes d’amélioration de la base productive avec l’extension des superficies aménagées ; l’accompagnement à la production à travers le financement de la recherche, la formation et l’appui conseil aux producteurs avec l’ISRA, l’ANCAR et le FNDASP.
Parallèlement à ces activités, d’autres actions de soutien à la souveraineté alimentaire sont développées et prises en charge par d’autres ministères.
Le gouvernement sénégalais a érigé la promotion de la bonne gouvernance économique en priorité absolue. Peut-on affirmer que des avancées notables sont notées dans la lutte contre la corruption et les malversations financières, des fléaux tant décriés de nos jours ?
Tout à fait, le Président de la République a mis au rang de priorité la bonne gouvernance. Elle constitue une composante essentielle de l’axe 3 du PSE. Cette vision qu’il a déclinée pour une gouvernance transparente est aujourd’hui, plus que par le passé, au centre de nos préoccupations. Dès le début de son magistère, le Chef de l’Etat a entrepris des réformes pour
la rationalisation des dépenses publiques et le renforcement du cadre juridique et institutionnel de la lutte contre la corruption, afin d’assurer la promotion de l’État de droit et de la bonne gouvernance. Ainsi, en plus des organes de contrôle déjà̀ existants comme la Cour des Comptes, l’Inspection Générale d’État (IGE) et la Cellule nationale de Traitement des Informations Financières (CENTIF), le Chef de l’Etat a créé́ l’Office national de Lutte contre la Fraude et la Corruption (OFNAC) et a élargi la Déclaration de Patrimoine à certaines autorités et agents publics. La réduction de la corruption est érigée au rang de cible prioritaire des politiques et stratégies du pays. Cette option est contenue dans le Programme national de bonne gouvernance (PNBG) qui opérationnalise la stratégie nationale de bonne gouvernance (SNBG). Cette stratégie définit la feuille de route pour combattre le fléau au Sénégal. Elle vise à améliorer l’efficacité des interventions en fédérant toutes les actions menées pour combattre efficacement la corruption.
A propos toujours de la bonne gouvernance, la Cour des comptes a constaté la récurrence du non-respect des lois et règlements en matière de gestion budgétaire et le non-suivi de ses recommandations. Que faut-il faire pour inverser la tendance et inscrire le pays sur les sentiers de la transparence de la gestion des deniers publics ?
Les recommandations de la Cour des Comptes ont toujours été prises en compte. Et mieux, nous échangeons régulièrement avec la Cour et nous intégrons ses pertinentes suggestions pour améliorer constamment la gestion des finances publiques. Pour ce qui est du rapport sur les dépenses liées à la Covid-19, il faut comprendre que c’était une période exceptionnelle au cours de la laquelle, les contrôles ont été très allégés, voire supprimés dans certains cas, afin d’apporter plus de célérité dans la prise en charge de la pandémie.
Le Gouvernement donnera suite aux recommandations de la Cour et s’attachera à les capitaliser, pour améliorer ses procédures et dispositifs d’exécution des marchés, prenant en compte les enseignements de la gestion telle que nous l’avons vécue avec la COVID.
Concernant les suites judiciaires et administratives préconisées, nous l’avons rappelé il y a quelques jours, la réglementation en la matière sera appliquée et les mesures appropriées prises.
Au total l’exploitation de ce rapport devra contribuer à raffermir notre option en matière de redevabilité, tout en permettant une amélioration significative de la gestion de nos finances publiques.
Question personnelle : après avoir été un haut-fonctionnaire émérite, vous avez été
investi de la confiance du Chef de l’État pour assumer la fonction de ministre des Finances et du Budget ? Quel challenge personnel voulez- vous relever et l’image que vous voulez laisser à la postérité ?
Servir mon pays comme un soldat, en apportant ma contribution à son développement, à sa stabilité et à l’amélioration des conditions de vie de nos concitoyens.
Quel est votre plus grand vœu pour 2023 ?
Je souhaite qu’elle soit une année de paix, de concorde et de prospérité pour le Sénégal et pour chacun de mes compatriotes
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