L’interdiction des manifestations a été l’une des premières mesures prises depuis le déclenchement de la Covid-19 et qui a lourdement affecté le secteur culturel sénégalais. Rideaux baissés pour tout le monde, en attendant de savoir de quoi demain sera fait. Au niveau du Grand Théâtre de Dakar, le talentueux chanteur Waly Seck, alors au programme d’un concert, a été obligé d’annuler son spectacle, alors que son équipe technique était en pleine installation du podium et du matériel de sonorisation. L’annulation de ce concert ne touchait pas spécifiquement Waly Seck et son orchestre, mais surtout beaucoup de Sénégalais, parce que le secteur de la Culture crée beaucoup d’externalités : transport, location d’espace, restauration, etc. Tout ce beau monde a été impacté par la décision d’annuler le spectacle.
« C’est ainsi que l’interdiction des manifestations a mis à l’arrêt tous les secteurs de la Culture, que ce soit au niveau du Grand Théâtre ou du Musée des Civilisations Africaines : toutes les visites ont été suspendues. Il en a été de même au Monument de la Renaissance Africaine ou encore à la Maison des esclaves de Gorée. Tous ces sites ont été immédiatement fermés et par conséquent, il n’y a plus d’activités significatives du secteur de la Culture», souligne Oumar Badiane, le Directeur des Ressources Humaines du Grand Théâtre.
Capacité de survie
En outre, cette institution culturelle très fréquentée par les jeunes Sénégalais a été durement affectée par la mesure d’interdiction des visites payantes. En effet, pour l’année 2020, le Grand Théâtre attendait 60 000 visiteurs, avec toutes les retombées financières que cela engendreraient pour ses comptes, mais ce coup d’arrêt en pleine saison des visites a tout remis en cause. «Ces recettes sont immédiatement réinvesties dans d’autres activités ou investies pour l’acquisition de nouveaux matériels, voire pour payer des salaires. Dès que la source de revenus est bloquée, il n’y plus possibilité de faire autre chose. La seule chance que nous avons, peut-être, c’est que tous ces sites sont des institutions de l’Etat et les fonctionnaires sont payés. En tous cas, jusque-là, l’Etat assure les salaires. Maintenant si cela dure, je ne sais pas si l’Etat pourra encore soutenir ce rythme. Encore qu’à chaque fois qu’il y a production, le Trésor public encaisse autant que nous, par le biais des taxes. Imaginez que la situation perdure et que le Trésor n’encaisse plus rien. Il sera très difficile et risqué de créer beaucoup de blocages. Pour me résumer ; je dirai que la Covid-19 réduit la capacité de survie de tous ces établissements culturels. Puisqu’il n’y aura plus possibilité de réinvestir des fonds, soit pour soutenir le paiement des salaires ou encore engager des projets sérieux», détaille M. Badiane.
Interpellé sur le coût de l’impact de la Covid-19 sur les chiffres de l’industrie culturelle, M. Badiane avoue pour le moment être incapable de l’évaluer correctement. «Aujourd’hui, aucune structure de l’Etat ne peut évaluer ce manque à gagner, mais ce qui est sûr, c’est qu’il va se chiffrer à des milliards de francs. D’autant plus que cela est survenu en période faste pour le secteur, à un moment où normalement, cela tourne à plein régime. Il y a aussi un impact touristique très important, qui a causé de pertes énormes».
Si pour beaucoup de secteurs l’après-Covid-19 se dessine déjà avec certaines certitudes quant la à formulation d’offres d’événements, il serait très difficile pour le secteur des Arts et Spectacles vivants de parler de réadaptation. Pour la simple raison que quand on parle de spectacles vivants, c’est en présence d’un public.
«C’est ce qui rend l’ambiance attrayante et donne tout son effet. La seule chose qui puisse nous aider actuellement, c’est que la Covid-19 s’en aille et nous laisse continuer à respirer tranquillement», prie M. Oumar Badiane.
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