Notre analyse tentera d’apporter des réponses à ces questions et d’élucider quelques zones d’ombre sur les notions de Bancassurance et d’Assurbanque en mettant l’accent sur la Bancassurance.
NOTIONS DE BANCASSURANCE ET D’ASSURBANQUE
L’octroi de crédits bancaires étant généralement subordonné à la souscription des produits d’Assurance pour garantir le remboursement, certaines banques ont eu l’idée de distribuer des produits d’assurance parallèlement aux opérations bancaires, c’est la naissance de la Bancassurance. Celle-ci date de 1970 avec une première expérience de la banque mutualiste «Le Crédit de l’Alsace-Loraine» qui avait effectué, pour la première fois, la distribution de l’Assurance par la Banque.
La Bancassurance peut être définie soit d’un point de vue fonctionnel, soit d’un point de vue institutionnel.
Le point de vue fonctionnel s’entend comme des services financiers intégrant des produits de la Banque et de l’Assurance et le second concerne la manière dont est organisée la collaboration entre la Banque et l’Assurance. Par ce terme, on regroupe les Banques développant des activités d’Assurance par opposition aux compagnies d’Assurance qui distribuent des produits bancaires, on parle alors d’Assurbanque.
L’Assurbanque est un nouveau concept qui désigne le fait pour certaines sociétés d’Assurance de proposer à leurs clients une palette de services «purement» bancaires (compte courant, livrets, crédits,…).
LES APPORTS DE L’ASSURANCE A LA BANQUE
L’Assurance offre d’énormes opportunités au secteur bancaire. Le développement de la Bancassurance en est une parfaite illustration.
En effet, lorsque le banquier octroie des crédits, il exige souvent de ses clients la souscription d’une police d’assurance garantissant le remboursement des prêts. Il était donc d’usage de recourir aux services d’un intermédiaire d’Assurance. Conscientes des avantages relatifs aux commissions perçues par ces intermédiaires, certaines banques ont décidé de se passer de leurs services et de gérer elles-mêmes ces contrats afin d’encaisser les commissions substantielles y afférentes.
Aujourd’hui, la Bancassurance entre dans une ère où les structures évoluent via des alliances entre banquiers et assureurs. Le Sénégal et les autres pays africains connaissent le même mouvement de rapprochement entre les Banques et les Assurances. Parmi les Banques implantées au Sénégal, il a été relevé que sept compagnies d’Assurance comptent au nombre de leurs actionnaires, des établissements financiers.
Par ailleurs, quatre banques ont été identifiées comme détentrices d’une participation dans une compagnie d’Assurance Vie.
LES APPORTS DE LA BANQUE A L’ASSURANCE
Contrairement à la Bancassurance, l’Assurbanque n’a pas encore fait la preuve de son succès et certains réseaux ou agences font marche-arrière. Le modèle de l’Assurbanque perçu comme une réponse à l’offensive des Banques dans le monde de l’Assurance qui ont longtemps taillé une part sur le marché traditionnel des assureurs, peine à décoller.
Mais l’on ne pourrait limiter les opportunités de la Banque à l’industrie des Assurances à la seule commercialisation des produits bancaires (Assurbanque).
Le passage dans les quatre ans d’un capital minimum de 3 à 5 milliards FCFA pour les compagnies d’Assurance dans la zone CIMA nécessite une levée de fonds supplémentaires. Dans ce cadre, le partenariat privilégié entre les entreprises d’Assurance et les Banques pourrait être renforcé en permettant à celles-ci d’augmenter leur prise de participation dans le capital des compagnies d’Assurance.
De plus, le domaine bancaire, dont la même réforme de hausse du capital social minimum a vu le jour en 2007 dans l’Union Monétaire Ouest-Africain (UMOA), peut également être un modèle pour l’industrie des Assurances. En effet, les compagnies de la zone CIMA pourraient s’inspirer des stratégies qui ont été développées par les banques pour survivre à cette exigence réglementaire.
L’IMPACT DE LA BANCASSURANCE SUR LE MARCHE
Chaque acteur de Bancassurance (Banque, compagnie d’Assurance et consommateur) doit, en effet, trouver son profit à voir se développer avec succès le modèle Bancassurance.
- Les avantages
- Pour l’assureur :
Grâce à la Bancassurance, l’assureur élargit de façon significative sa clientèle et atteint des cibles jusqu’ici difficiles d’accès. Il pourra varier ses modes de distribution, lui permettant d’éviter une dépendance trop grande à un réseau unique.
Des statistiques officielles mesurant la part de la production générée par la Bancassurance ne sont pas disponibles. Toutefois, nous savons que le Décès emprunteur vendu à travers les guichets des banques correspond à la garantie Décès collectif apparaissant dans les états C1 des compagnies d’Assurance. Il ressort de ceux-ci un taux de contribution de 32%, soit 10,8 milliards FCFA en valeur absolue, à l’actif de la Bancassurance, au titre de la commercialisation du produit Décès emprunteur dans la formation du chiffre d’affaires des sociétés Vie, en 2015 (cf. rapport d’activité de la Direction des Assurances sur l’exercice 2015).
- Pour la Banque :
A travers la Bancassurance, la Banque se procure des revenus supplémentaires, les commissions versées par les assureurs constituent des fonds pour alimenter les banques.
Au Sénégal, la rémunération des banques sur la commercialisation de ces produits se fait sous forme de commissions comprises :
- entre 3 et 5% des primes nettes de frais de gestion pour la Vie,
- entre 18 et 25% des primes nettes de frais de gestion pour l’IARD.
La Bancassurance favorise aussi la conquête de nouveaux clients.
- Pour le consommateur :
La Bancassurance est une opportunité pour le consommateur de se procurer des produits simples avec un paiement des primes adaptés à leurs besoins et une accessibilité plus facile. Elle favorise une tarification plus compétitive.
- Les inconvénients
L’ère de la Bancassurance a malheureusement mis à mal les intermédiaires traditionnels d’Assurance, notamment les courtiers et les agents généraux.
La gestion des produits bancaires et celle des produits d’Assurance requièrent des stratégies différentes. Aussi, l’implication dans la vente de ces deux produits peut s’avérer complexe pour le banquier. C’est pour cette raison que le législateur exige du banquier que le personnel affecté à la distribution de l’Assurance justifie d’une carte professionnelle dont l’obtention nécessite une bonne formation en Assurance. L’Institut Interafricain de Formation en Assurance et en Gestion des Entreprises (IFAGE) de Dakar pourrait accompagner les banques dans la formation de leurs cadres dans le domaine des Assurances.
Pour conclure, il convient de noter que la Bancassurance est à ses balbutiements dans les pays en développement qui accusent un retard considérable par rapport aux pays développés. Dans la zone CIMA, les deux secteurs (Assurance et Banque) ont pris conscience de cette situation et travaillent déjà dans une dynamique de promotion des produits Bancassurance, ce qui laisse présager un énorme potentiel de développement.
Mandaw KANDJI
PDG de IFAGE
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