Qui choisit les épreuves du Baccalauréat au Sénégal ? Quelles sont les mesures prises pour garantir la confidentialité ? Cette fiche d’info apporte des réponses.
Au Sénégal, le Baccalauréat (Bac en abrégé) est considéré comme le premier diplôme universitaire. Le candidat doit passer plusieurs épreuves qui diffèrent selon qu’il est en série littéraire, scientifique ou technique. L’examen de cette année a été marqué par des fuites dans les épreuves de français et d’histoire-géographie. Epreuves annulées puis reprises quelques jours plus tard. Comment choisit-on les sujets ? Africa Check a cherché à comprendre cette partie du processus qui mène à l’examen du Bac.
Quel est le cadre juridique ?
En 1995, le président Abdou Diouf a pris un décret pour réglementer le processus relatif à l’examen du Baccalauréat sénégalais. Ce texte a été remplacé par le décret n°2000-586 du 20 Juillet 2000 puis complété par un décret d’avril 2002 portant organisation du Baccalauréat. Cette disposition réglementaire attribue l’organisation technique de cet examen à l’Office du baccalauréat, un démembrement de l’enseignement supérieur. D’ailleurs, son siège est au cœur de l’Université Cheikh Anta Diop (UCAD) de Dakar.
Qui est impliqué dans le processus ?
Tout part de l’Inspection générale de l’éducation. Une décision présidentielle de 1977 modifiée par un décret du 22 juin 2014 portant création, organisation et fonctionnement de l’Inspection générale de l’éducation et de la formation (IGEF) confie aux inspecteurs généraux plusieurs missions. Il s’agit de la présidence des jurys d’examen et de concours (Baccalauréat, Concours général, la certification des sortants de l’Ecole normale supérieure) et du choix des sujets du Baccalauréat et du concours général. L’IGEF est dirigée par un doyen. «Au mois de novembre de chaque année, des professeurs sélectionnés par les inspecteurs généraux de l’éducation sont saisis par courrier. On leur demande de proposer des sujets d’examen du Bac », renseigne Moustapha Sow, professeur et président de jury au Bac en 2017. M. Sow a vu son sujet sélectionné en 2006, pour les épreuves du second tour.
Trois sujets dans chaque matière
L’ex-coordonnateur du Grand cadre des syndicats d’enseignants, Mamadou Lamine Dianté, a confié à Africa Check que, par la suite, une sous-commission composée d’enseignants en service dans les régions de Dakar et de Thiès est convoquée à l’Office du bac. «Sous la supervision des inspecteurs généraux, pour chaque discipline, il est choisi un sujet de premier tour, un autre pour le second tour et un sujet de secours», a précisé M. Dianté. Selon Moustapha sow, professeur d’histoire-géographie, et le syndicaliste Mamadou Lamine Dianté, les sujets retenus sont confiés à l’Office du bac, la «seule structure compétente pour l’organisation technique» de cet examen.
Comment assure-t-on donc la confidentialité ?
L’Office assure la reproduction en fonction du nombre de candidats au Bac, généralement connu avant le mois de mars de l’année scolaire. Contactée par Africa Check, une assistante de l’Office du bac a signifié que la structure refuse de se prononcer sur le sujet dans le contexte actuel. Quoi qu’il en soit, à l’Office du bac, les sujets sont gérés par la Division pédagogie. Elle est chargée de la reprographie, de les mettre dans des males scellées, et de les acheminer dans les centres d’examen, quelques jours avant le démarrage des épreuves. M. Dianté d’ajouter que la division pédagogie dispose de photocopieuses qui lui permettent de tout reproduire en interne. «Une fois dans les centres d’examen, les sujets sont remis aux chefs de centre qui sont le plus souvent le proviseur du lycée ». «Puis arrivent les présidents de jury, souvent des enseignants à l’université et des titulaires de classe de Terminale. Ils accusent réception des épreuves. Le jour de l’examen, les males sont ouvertes devant les examinateurs et les enveloppes qui contiennent les épreuves le sont dans les salles d’examen, devant les candidats», explique-t-il.
Un exercice en principe secret
Moustapha Sow note que le professeur dont le sujet a été sélectionné pour le Bac n’est pas informé de cette décision. «Il découvre les sujets le jour de l’examen au même titre que les autres examinateurs. Lorsque vous êtes saisi pour proposer un sujet, on vous fait mention de ne jamais le traiter avec vos élèves durant l’année scolaire. Le professeur n’est pas rémunéré pour ce sujet», relève-t-il. A tous les niveaux, les deux enseignants s’accordent que les acteurs impliqués sont tenus de garder les sujets secrets.
La part de responsabilité des inspecteurs
En collaboration avec les universités et les inspections d’académie, l’Office du bac organise l’examen qui débute chaque année, avec les épreuves anticipées de philosophie. Africa Check a contacté l’inspecteur général de l’éducation Mor Ndao. Ce dernier n’a pas souhaité se prononcer «dans le contexte actuel», en invoquant un «devoir de réserve». Par contre, l’inspecteur d’académie à la retraite Cheikhou Mbaye Touré a dit à Africa Check que les inspections d’académie ne sont impliquées que dans l’organisation technique du Bac. «Elles n’interviennent pas dans le choix des sujets», précise-t-il. Selon lui, «les inspecteurs généraux de l’éducation supervisent le processus mais ils responsabilisent les enseignants pour éviter d’être juge et partie car ils ont également pour mission le contrôle pédagogique».
En définitive, en plus des enseignants, plusieurs acteurs institutionnels sont impliqués dans le processus de choix des sujets et dans l’organisation de cet examen. Toutefois, l’Office du bac, notamment sa division pédagogie est au cœur du processus dès lors qu’elle assure la gestion quasi-permanente des épreuves une fois choisies. Celles-ci y séjournent pendant plusieurs mois avant d’être acheminées sous males scellées dans les centres d’examen.
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