Non, cette «Der» aura un goût particulier. Un indescriptible goût de trop et de trop peu, mêlé, déjà, d’un parfum de nostalgie. Bien plus que le spleen d’une année finissante, c’est l’impression qu’on prend congé de ses amis car cette dernière chronique, vous l’aurez peut-être compris, clôture un cycle, celui de cette passionnante aventure de SocioBiz.
Oui, il faut savoir partir, remercier pour tout le bonheur que j’ai eu à partager la vie de milliers de lecteurs (en tout bien, tout honneur, bien-sûr), tirer la porte doucement et s’en aller sur la pointe des pieds, en espérant partager avec tant d’anonymes les souvenirs communs de ces chroniques sans prétention, impertinentes dans leur prétention de rester pertinentes, ou tout au moins porteuses de messages profonds sous des dehors de galéjades et d’humour potache.
A l’heure de l’adieu, j’accepte de battre ma coulpe. Je plaide coupable pour exercice illégal de la médecine, pour avoir disséqué vivant l’«homo senegalensis». Coupable aussi de délation de comportements inappropriés, coupable de mauvais traitements, voire de torture mentale et psychologique. J’assumerai la sentence. Mais, je réfute toute accusation de diffusion de fausses nouvelles et non-assistance à société en danger…
Car c’est ce que je souhaite qu’on retienne de ma modeste contribution au Débat Public. Non les ratiocinations d’une intellectuelle Bac +15, pétrie de références et de certitudes, mais la citoyenne, militante, amoureuse, patriote, passionnée, qui fait grincer son stylo sur le papier glacé d’un magazine, tout ce qu’il y a de conventionnel, qui atterrit sur des bureaux en bois noble ou en contrecollé.
De mon travail, je voudrais qu’on retienne les diatribes échevelées, les coins du voile soulevés, les polémiques amorcées, les coups de pied dans la ruche Sunugaal. De moi, je voudrais qu’on retienne la journaliste «imposteuse», l’écrivain de l’instantané, le poil à gratter attitré et assumé mais surtout, si vous en êtes d’accord, l’humaniste, car comme le disait Carthaginois Terence, «je suis Homme (enfin… Femme) et rien de ce qui est Humain ne m’est étranger»…
A ce titre, et à celui-là uniquement, j’ai exercé mon droit de «l’ouvrir», avec la complicité de mon Dirpub et Serigne bien-aimé, (et cette fois, ce n’est pas ironique…) et la tolérance tantôt amusée, tantôt agacée d’un lectorat, rarement indifférent. C’est donc à vous que je m’adresse aujourd’hui, vous qui avez suivi mes délires, mes coups de gueule, mes coups de griffes, mes coups de cœur, mes coups de sang, depuis que cette rubrique existe, c’est-à-dire sept longues et exaltantes années.
J’aurai failli à mon propos initial si j’avais laissé uniquement l’impression d’être contre : contre la gestion ou la gouvernance au doigt mouillé, contre l’impunité des mandataires du peuple, contre leur courte vue congénitale et la gestion par les contraintes, contre l’incurie dans notre système productif, contre la politique de la gamelle tendue, contre le laisser-faire et le laisser-aller. Mon propos, mon ambition de citoyenne amoureuse de sa Cité, de son Continent, de son époque, était juste d’être modestement «force de proposition» : pour une Afrique, un Sénégal, une ville colorée !
Pour cela, j’espère avoir trouvé le bon ton, sans angélisme, sans misérabilisme, sans stigmatisation, sans paternalisme, mais surtout sans complaisance. A l’issue de ces sept années de compagnonnage, près d’une centaine de chroniques, presqu’autant de thèmes (et Dieu sait qu’il y a encore à dire), deux volumes de mes délires impertinents et irrévérencieux, je n’ai qu’un mot : JAARAAMA ! Merci de m’avoir accueilli chez vous, dans vos bureaux, vos maisons, vos transports, votre intimité de pensée. Merci pour tous ces retours, ces encouragements, les lettres, mails, post qui ont prouvé que la rubrique a peu laissé indifférent. Pardon aussi d’avoir (volontairement) agacé, exaspéré, titillé, tourmenté.
Le temps est venu pour moi d’aller vers d’autres aventures, d’autres défis tout aussi excitants, (jamais loin de la plume, je vous rassure) mais je garde en moi ce lien amical et complice, ténu mais solide, qui scelle notre ambition commune pour l’élévation de «l’homo senegalensis» et le mieux-être de «Cher Pays».
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