Que de critiques adressées au système du FCFA. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que ses pourfendeurs ne manquent pas d’arguments. Et la déclaration de Carlos Lopez, secrétaire exécutif de la Commission économique des nations unies pour l’Afrique, en début octobre 2016, a sonné comme un réveil des spécialistes. « Le système du FCFA est désuet. La BCEAO (Banque centrale des Etats de l’Afrique de l’ouest) et la BEAC (Banque des Etats de l’Afrique centrale) donnent la priorité à la lutte contre l’inflation et non pas au développement. Elles pratiquent une politique monétaire restrictive qui pénalise les entreprises qui ont besoin de liquidité », avait-il déclaré. A sa suite, un groupe d’économistes africains publient l’ouvrage « Sortir l’Afrique de la servitude monétaire : A qui profite le franc CFA?». Un opus dans lequel ils prouvent comment le système franc CFA a été mis en place pour servir les intérêts de la France. Pour Kako Nubukpo, économiste, la donne est claire, «notre monnaie, le Franc CFA, n’est pas au service de la croissance et du développement ».
Et selon l’économiste sénégalais Ndongo Samba Sylla, « le franc CFA est l’une des meilleures expressions du manque d’indépendance économique des pays qui l’utilisent … Les représentants de la France au niveau des deux banques centrales ont une voix prépondérante dans le processus de prise de décision ».
Et comme pour le corroborer, l’ancien président de l’Assemblée nationale de Côte d’Ivoire Mamadou Koulibaly nous rappelle que ce système caduc date de 1945. Il a été mis en place sous le schéma du Mark Allemand qui avait été implanté en France pendant la période d’occupation qui permettait à l’Allemagne à l’époque d’exploiter les productions françaises pour financer la reconstruction et la guerre allemande. A la fin de la guerre, Charles De gaulle a répliqué le système dans les colonies françaises d’Afrique francophone.
Ce qu’en pensent des voix de la BCEAO
Alors que le terme de servitude volontaire revient souvent chez les économistes, M. Thiemoko Meyliet Koné, le gouverneur de BCEAO réfute cette thèse. « j’entends dire que rien n’a changé depuis 1962 alors qu’il y a eu, dans l’UEMOA, plusieurs réformes importantes entre 1975 et 2008 : les mécanismes et les instruments de la politique monétaire ainsi que la gestion du franc CFA ont évolué pour s’adapter aux besoins des Etats… Ceux qui s’intéressent réellement au sujet savent que, dans l’UEMOA, c’est évidemment la BCEAO et le Comité monétaire qui décident des actions appropriées en fonction du contexte … Les réserves déposées par les Etats auprès du Trésor français sont la contrepartie d’une garantie assurée par la France : celle de la convertibilité illimitée du CFA … Il n’y a là, aucun rapport de soumission», a-t-il relativisé. Dans le même sillage, M. Kako Nubukpo (ancien chef de service au sein de la BCEAO, de même qu’à la commission de l’UEMOA, ancien ministre auprès de la Présidence de la République Togolaise), révèle que depuis le 1er avril 2010 la BCEAO conçoit et exécute elle-même sa politique monétaire de l’union. Mais alors pourquoi les deux gouverneurs BEAC et BCEAO laissent plus de 13 000 milliards de FCFA dormir dans les caisses du trésor public, alors que les textes ne leur impose que 20% de cette somme ? C’est pourquoi il parle de « servitude volontaire ». La BCEAO dépose 90% de réserves déposées par les Etats auprès du Trésor français, tandis que la BEAC est à 97%. Ce système qui existe depuis plus de 70 ans ne profite guère aux économies des pays francophones d’Afrique, et surtout, il empêche les 14 pays membres de se développer.
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