C’est vraiment sans langue de bois que M. Manar Sall s’est prêté aux questions de nos confrères de Dakaractu. L’expert en hydrocarbures évoque tous les contours et enjeux du secteur pétrolier avec ses derniers agissements.
A chaque fois qu’un pays a découvert du pétrole, la question de la malédiction a été agitée. Interpellé sur la question l’expert n’y vas pas par le dos de la cuillère. Pour lui, on devrait dire plutôt « malédiction des ressources naturelles ». « Le problème est simple. Si 1% de la population d’un pays veut accaparer et gérer 100% des ressources d’un pays, comment voulez-vous que cela ne se transforme pas en malédiction ? Comment un pays qui découvre que son sous-sol est riche, qu’il peut en extraire du pétrole, des minerais précieux, les exporter et gagner de l’argent, et que le chef de cet état n’ait que l’idée de s’enrichir personnellement avec sa famille et son clan, qu’il laisse le reste de la population étrangement pauvre, comment voulez-vous éviter une malédiction ? Cette malédiction commence par eux, même si le court terme leur laisse à penser que tout baigne et que tout va bien pour eux, mais plus tard, on a toujours vu les mêmes résultats et les mêmes chutes morbides. « Tant va la cruche à l’eau, qu’à la fin elle se casse », dit l’adage. Tant qu’on n’aura pas des dirigeants qui peuvent comprendre que la chose publique ne peut pas se gérer de façon familiale ou clanique, que la politique n’est pas un viatique pour la richesse, tant qu’on ne sortira pas de ce schéma-là, je ne vois pas comment nous profiterons de nos richesses naturelles. Gérons déjà bien le peu de ressources que l’on a, ça nous aidera à mieux gérer encore plus de ressources et de richesses« , a-t-il pesté.
Nos confrères n’ont pas manqué de l’interpeller sur la question du carburant toxique. Pour lui, c’est un événement malheureux qui a pu déclencher une telle étude de l’ONG Public Eye. Car rappelle-t-il, « en 2006, il y a eu l’affaire du Probo Koala en Côte d’Ivoire, où des déchets toxiques, issus de produits pétroliers, ont été envoyés en Afrique, après moult refus d’autres pays européens notamment. Ces produits toxiques ont été réceptionnés par une société créée en un mois seulement par un ivoirien, qui a éparpillé ces déchets autour de la Lagune Ebrié à Abidjan. Résultat : 17 morts et des milliers de personnes impactées et marquées à vie. Pour un scandale de la même ampleur dans le Golfe du Mexique, il a coûté à British Petroleum, BP, 20 milliards de dollars. La Côte d’Ivoire n’a reçu « que » 100 milliards de francs Cfa d’indemnisation. Voilà le problème. Si nous, africains, acceptons que le niveau de la réglementation soit extrêmement bas, que la pollution de l’air ne soit pas un problème pour nous et pour la santé de nos concitoyens, que l’on peut accepter de recevoir du carburant avec un PPM supérieur à 50, ou 500 ou 1000, on ne peut pas en vouloir à un trader qui cherche à se faire de l’argent », dit-il. Pour M. Sall, on ne peut pas nous faire croire qu’une vie humaine africaine n’a pas la même valeur qu’une vie humaine sur un autre continent. « Nous devons nous mettre au même niveau d’exigences que tous les pays européens ou américains. Nous devons cesser de penser qu’en l’espèce, Dieu nous aidera à vivre avec des standards moins élevés que dans les pays développés. Il serait temps que nos responsables comprennent qu’on doit développer une politique liée à l’environnement, au bien-être des citoyens sénégalais, et qu’on ne peut pas transiger avec cela« , clame-t-il.
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