Patron du Groupe Beezy Africa comprenant une agence de communication, une régie publicitaire et un magazine tendance, Mme Penda Diop Cissé veut pleinement participer à la relance économique de la Côte d’Ivoire et de la sous-région. Entretien.
Peut-on savoir le parcours de l’entrepreneur que vous êtes ?
On peut dire que j’ai un parcours d’un membre de la diaspora classique. Je suis partie en France en tant que fille de diplomate sénégalais. J’ai voyagé dans beaucoup de pays, surtout au Maghreb. J’ai obtenu mon bac au Maroc. Puis, j’ai fait mes études dans les Grandes Écoles en France où j’ai attrapé le virus de l’international. J’ai commencé à travailler au Canada, ensuite aux États-Unis pour LVMH. Un cursus fortement lié au contrôle de gestion. Quand j’ai eu la chance de retourner en Afrique en 2012, c’était pour moi, la première fois où vraiment je me confrontais au milieu professionnel sur le continent, dans un pays tel que la Côte d’Ivoire, qui venait de sortir d’une période de crise. L’ambiance était encore austère – tout le monde était très prudent sur les opportunités de business. On se demandait si la transition allait bien se faire. Avec tous ceux qui sont revenus en Côte d’Ivoire, on peut dire qu’ils avaient pris un grand risque, mais on avait bien espoir. On ne l’a pas regretté au final. J’ai commencé à travailler pour Canal Plus. Ensuite, je me suis tout de suite dit que c’est un pays qui donne des opportunités de développement personnel et des opportunités économiques extraordinaires – donc, je me suis lancé dans l’entrepreneuriat.
Expliquez-nous comment ça s’est passé ?
J’ai commencé à monter une entité en partenariat avec LVMH, naturellement. Je me suis dirigée vers la promotion des produits de luxe via des sociétés en France intéressées par ce marché. Il fallait comprendre les besoins des consommateurs, avoir plus de données économiques. J’ai commencé par des ventes privées avec de l’événementiel, du «relooking», du maquillage, avec des marques comme Niwel de Franck Provost pour les peaux métissées et les cheveux crépus.
J’ai travaillé dans ce secteur pendant un an et après, je me suis rendue compte, de manière générale et plus globalement, que ces marques avaient un fort intérêt pour le marché africain. Vu d’une autre manière, dans le panier de la ménagère africaine, la proportion liée aux produits de beauté ou d’entretien était plus importante que chez les Européens. Ils étaient très intéressés à développer une franchise et à travailler avec des professionnels de la communication, en général.
Suite à ce constat, je me suis dit qu’il serait intéressant de monter une société de communication de manière à faire de l’événementiel, comme je le faisais avant, mais avec une expertise et une visions à 360°, tout en prodiguant des conseils aux potentiels partenaires. L’objectif étant de rentrer dans cette grande chaîne de la communication avec une régie publicitaire et un magazine, lié à la Culture, l’Art, la Mode – tout ce qui se fait de plus raffiné, on va dire, en Afrique.
Comment avez-vous trouvé l’environnement des affaires en Côte d’Ivoire ?
Je pense que, depuis longtemps, la Côte d’Ivoire a toujours été le grenier, le pays avec le plus fort potentiel économique de la sous-région. C’est vrai qu’il y a eu une petite parenthèse liée aux troubles, mais cela repart très fort, naturellement, avec les produits-phares que sont le café-cacao, les industries, les infrastructures en pleine phase de rattrapage…
Maintenant, en tant que professionnelle de la communication, je me suis rendue compte que, parallèlement à cette embellie économique, il fallait aussi rattraper des capitales comme Dakar où la publicité était très développée. Aussi, on devait accompagner cet élan économique pour les matcher avec les potentiels clients. Davantage de sociétés étrangères s’installent en Côte d’Ivoire et proposent des produits qui ont une qualité équivalente à celle de l’Europe pour un marché africain qui est en forte demande.
Quel a été votre positionnement sur ce marché ?
Nous avons fait le choix d’avoir une taille critique, c’est-à-dire proposer un portefeuille de services avec une vision à 360°, dans la mesure où on a une agence conseil en communication fortement portée sur les métiers digitaux (2.0) où de nombreuses sociétés n’ont pas encore de présence intéressante. Leurs sites web ou leurs réseaux sociaux sont mal utilisés. Donc, nous avons vite fait le choix de proposer une panoplie de services concernant le digital et aussi de proposer des vidéo-productions.
En Côte d’Ivoire, la libéralisation de l’audiovisuel n’est pas encore effective. La télévision numérique arrive avec de nouvelles chaînes à côté de la RTI. Donc, tout ce beau monde va être demandeur de contenus. Une occasion et un moyen pour les annonceurs de proposer des publicités et autres services. On a aussi une régie publicitaire et un nouveau magazine, CHIK. Notre vision globale et à 360° accompagne nos annonceurs et nos les clients d’un point de vue stratégique grâce à des supports médias adaptés à leur besoin de communication.
Comment se passe l’intégration de la Diaspora dans ce pays ?
L’intégration se passe bien. La Côte d’Ivoire est un pays aujourd’hui où la Diaspora provient de tous les horizons. Il y a une élite internationale qui était à l’étranger avec de très bons emplois et qui s’installe en Côte d’Ivoire. Au delà de cela, des cadres qui étaient au Sénégal et dans la sous-région arrivent et s’intègrent, le pays ayant une grande culture et tradition d’accueil. La Côte d’Ivoire est un vrai melting-pot de tous les pays limitrophes où chacun peut apporter sa contribution personnelle tout en étant dans l’axe de l’émergence du pays.
Si je comprends bien, la crise est bien derrière nous…
Pour l’instant, en tout cas, on a comme l’impression que tout cela est derrière nous. La communauté internationale, d’ailleurs, le confirme très bien. Par exemple, Air France opère 2 vols par jour – et ces vols sont largement achetés par des étrangers, Européens, Américains, etc., qui viennent pour les affaires à Abidjan. On peut ainsi constater que la communauté internationale est rassurée et que le business va bon train. Les grandes conférences internationales, qui avaient lieu à Dakar ou Johannesburg, s’intéressent à Abidjan aujourd’hui. Le niveau de l’infrastructure le permet. Les ponts, les routes, les grands hôtels, tout est en effervescence. Et pour soutenir cette évolution, le Président Ouattara investit dans les stratégies marketing à l’international pour accueillir tous ces étrangers qui souhaitent investir en Côte d’Ivoire – on peut donc dire que le contexte actuel est très favorable. La législation, simplifiée aussi, avec la loi sur le CPCI qui permet de créer son entreprise en 48 heures. Aujourd’hui, on peut dire que tous les indicateurs sont au vert pour qu’un jeune entrepreneur désireux de monter sa propre société puisse le faire en toute tranquillité.
Votre mot de la fin ?
En tant que société pluridimensionnelles basée sur la communication, nous visons aujourd’hui l’intégration régionale – nous avons réellement envie d’avoir et de soutenir des marchés régionaux. Nous espérons également une réduction des coûts de transports, pour que nous puissions avoir des succursales et filiales à travers l’Afrique et créer des campagnes, on va dire, sous-régionales, pour plus de diversité dans la manière de communiquer.
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