L’enseignement supérieur public au Mali se meurt à petit feu depuis des années, au profit des écoles privées qui prennent, de plus en plus, le dessus. Cela a commencé depuis la faillite des universités publiques.
L’enseignement supérieur se trouve confronté à des difficultés qui ont conduit, progressivement, au déclin du système. Le résultat, c’est l’émergence d’écoles et instituts privés qui tentent de combler le vide. «On peut en nombrer au bout de chaque rue», selon un analyste.
La crise de l’école publique a débuté depuis les ajustements structurels imposés par les institutions de Breton Woods, alors qu’auparavant, c’était une référence dans la sous-région.
En plus des grandes écoles (Ecole normale supérieure, Ecole de médecine, Ecole nationale d’administration, Ecole nationale d’ingénieur, etc.), le Mali a ouvert sa 1ère université en 1994, à Bamako. Mais cela n’a pas suffi à absorber le grand nombre de bacheliers. Une autre université a été ouverte à Ségou.
Comment le secteur privé a-t-il pu s’imposer ?
En effet, la détérioration de la qualité de l’enseignement supérieur public est due, en partie, au faible niveau du corps professoral, à la détérioration de la qualité de l’éducation de base, à l’insuffisance des équipements et matériels pédagogiques et à la faible capacité des structures d’accueil. A cela, s’ajoute «la politisation de l’école malienne», selon Amadou Kounta, ex-étudiant de l’ex-Université du Mali. Pour lui, les autorités politiques ont saboté l’Ecole publique malienne, car ils sont les promoteurs des écoles supérieures privées. «L’Ecole privée à l’avantage d’avoir le minimum de confort, les meilleurs enseignants et moins de grèves», explique Ousmane Touré, enseignant dans un institut privé à Bamako. «Puis, il y a le suivi de l’étudiant par les parents, parce qu’ils paient. Tel n’est pas forcément le cas, lorsque l’enfant fréquente l’Ecole publique», explique M. Touré.
Si les enfants des riches fréquentent les universités étrangères, alors qui sont les «recrues» des instituts privés comme l’IHEM d’Abdallah Coulibaly, initiateur du «Forum de Bamako», ou encore l’IGLAM, une des rares écoles formant des journalistes au Mali ?
Ces écoles privées sont fréquentées par la classe moyenne à cause des coûts exorbitants pour le citoyen lambda. «Je n’ai pas le choix. Tous mes enfants sont inscrits à l’université publique où il y a un problème de niveau. Certains ne savent même pas faire deux phrases successives sans faire de fautes», regrette Mohamed, père de 4 enfants. «Pensez-vous que je peux payer 300 000 FCFA par enfant et par an avec le maigre salaire que je gagne ?», s’interroge-t-il.
Des subventions à la base
L’enseignement est devenu un vrai business au Mali. Si auparavant, quelques vieux retraités ayant servi dans le secteur ouvraient des écoles pour continuer à exercer, aujourd’hui tel n’est plus le cas. Le business est leur principale raison d’être. Des expatriés investissent dans des bâtiments flambant neufs, recrutent de jeunes diplômés sans emploi pour animer un «Business School». Une prolifération facilitée par l’Etat avec trop de «laisser-aller» dans les autorisations d’ouverture données, à tort ou à raison.
Dans certaines écoles, la qualité est le cadet de leurs soucis. Il suffit de renflouer les caisses, payer les taxes et impôts pour celles non subventionnées, et le compte est bon. Aucun contrôle-qualité. Parfois, les diplômes délivrés ne sont pas reconnus par l’Etat. La question est : comment permettre à une institution de former des jeunes et ne pas reconnaître le parchemin qui sanctionne la formation de 2 à 4 ans de «dur labeur» pour un innocent enfant, après le Bac ? Inadmissible !
Au niveau de l’Ecole publique, le gouvernement essaie de valoriser quelques talents à travers des bourses d’excellence, parfois octroyées dans le cadre de partenariats avec des pays occidentaux. Un quota très insignifiant au regard du nombre d’étudiants (des centaines de milliers). Une goutte d’eau dans la mer…
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