Le comité d’initiative pour le suivi de l’intégration (CIPSI) a fait savoir son opposition à l’adhésion du Maroc à la communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO). Le comité a rencontré la presse Vendredi 27 octobre à Dakar pour aborder la question.
Le secteur privé sénégalais fustige le mutisme du gouvernement et la non implication des acteurs économiques dans la réflexion sur la question de l’adhésion du Maroc à la CEDEAO. Le comité attend du gouvernement qu’il les associe à ses discussions. C’est la conviction du Président du comité d’initiative M Diallo KANE. «Le plus grand résultat que nous attendons c’est de voir l’Etat nous associer à ses discussions. Nous sommes là pour dénoncer le fait que le secteur privé sénégalais ne dispose d’aucune information officielle venant de l’Etat ou de la CEDEAO dans cette prise de décision et ce n’est pas seulement notre Etat c’est presque la même situation qui prévaut dans tous les Etats de la sous région. Nous avons sillonné une partie de l’Afrique pour rencontrer les principaux acteurs qui s’occupent de questions économiques dans ces pays et ils sont tous logés à la même enseigne. Le secteur privé Nigérian présente son refus catégorique à cette adhésion du Maroc à la CEDEAO». Nous ne sommes pas là pour denier à l’Etat son pouvoir de décision ; mais ce qui est déplorable c’est le fait que pour une question aussi importante que l’économie, la concertation ne soit pas engagée avec les acteurs économiques ». Explique M KANE Président CIPSI.
Par ailleurs, face à cette situation le comite regroupant notamment des organisations patronales et professionnelles des syndicats des travailleurs, des associations de la société civile et du monde universitaire, a pris l’initiative de mener une réflexion approfondie sur ce projet. Des lors le premier acte posé par le comité a été d’adresser une correspondance au Président de la République pour lui exprimer l’inquiétude du secteur privé de la société civile sur l’impact économique et social de l’adhésion du Maroc à la CEDEAO et inviter à une concertation sur le sujet.
Il convient au comite à ce titre, de montrer l’impact que peut avoir l’adhésion du royaume chérifien à la communauté économique au regard de sa puissance économique et diplomatique. Le Maroc a un PIB de 101,4 milliards USD au moment où le Sénégal en est à 14,77 milliards USD. Ce qui met en évidence une grande disparité entres ces deux économies. En plus de cela, l’adhésion de ce géant de l’économie africaine à la CEDEAO peut avoir des impacts sur les économies encore fragiles de plusieurs pays de l’espace économique. Le secteur de l’agriculture, les BTP ainsi que le secteur bancaire sont autant de secteurs sur lesquels le royaume chérifien dispose des potentialités qui peuvent étouffer les économies de ces pays.
Il est nécessaire à juste titre de rappeler un fait non moins important sur la structuration de la CEDEAO. Elle regroupe exclusivement des Etats appartenant à l’espaces Ouest africain, or le Maroc appartient au Maghreb c’est-à-dire l’Afrique du nord. Des lors il s’impose de réfléchir sur les motivations de cette volonté de rejoindre la communauté et la jurisprudence que cela pourrait servir cet acte pour d’autres pays n’appartenant pas à cette communauté. M. Mor Talla Kane membre du comité ne cache pas son inquiétude face à cette situation qui se présente. « L’adhésion du Maroc à la communauté risque d’ouvrir une brèche pour d’autres pays plus puissant à vouloir aussi rejoindre la CEDEAO et cela porterait préjudice à tout ce qui a été déjà fait jusqu’ici. Et ce que nous avons refusé jusqu’ici à l’Union Européenne nous ne le permettrons pas au Maroc parce qu’il n’existe pas d’effet d’élasticité géographique qui permet au Maroc de faire partie de l’Afrique de l’Ouest »dixit M .Kane
En ce qui concerne le Sénégal, malgré les droits de taxes que les produits agricoles en provenance du Maroc paient, la production agricole de certains produits en pâtit de plus belle. Le CIPSI sonne l’alerte face au dumping qui profile à l’horizon avec cette adhésion éminente.
La Conférence des Chefs d’Etats de la CEDEAO a répondu favorable le 04 juin à Monrovia à la demande du Maroc et a instruit la commission de la CEDEAO d’examiner les implications d’une telle adhésion, conformément aux dispositions du traité de la CEDEAO et de soumettre les résultats a sa prochaine session. Cette session est prévue pour le 16 décembre 2017 à Lomé soit dans moins de deux mois.
Yanda SOW et Florence KPOCHAN (stagiaires)